vidéo - 

L’exode des Rohingya victimes de persécutions en Birmanie

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 12 sept. 2017

Les Rohingya, minorité musulmane de Birmanie, fuient les persécutions de l’armée birmane. Ils se réfugient au Bangladesh, de l’autre côté de la frontière, en passant par le fleuve Naf. Ces réfugiés s’entassent dans des campements de fortune dans des conditions misérables.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
12 sept. 2017
Production :
INA
Page publiée le :
29 août 2019
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001923

Contexte historique

Par Christophe Gracieux

Les Rohingya, minorité musulmane établie dans l’État d’Arakan, à l’ouest de la Birmanie, vivent dans un pays dans lequel plus de 90 % de la population est bouddhiste. Depuis 1982, ils sont considérés par la junte militaire birmane comme apatrides, n’étant pas reconnus comme appartenant aux 135 ethnies officiellement recensées dans le pays. Les Rohingya subissent ainsi de nombreuses discriminations : ils ne peuvent accéder au marché du travail, accéder aux services publics, voyager ou se marier sans autorisation. Ils ont en outre à plusieurs reprises été l’objet de répressions de la junte militaire, notamment en 1978 et en 1991-1992, ce qui les a conduits à s’enfuir en masse au Bangladesh.

En 2017, les Rohingya sont victimes d’une nouvelle répression par l’armée birmane, d’une ampleur et d’une violence inédites. Ces représailles ont débuté après l’attaque d’une vingtaine de postes de police, le 25 août 2017, par des rebelles indépendantistes rohingya. Prenant prétexte de cette attaque, l’armée birmane lance une vaste opération de répression : des maisons et des villages entiers sont incendiés, des civils massacrés, de nombreuses exactions commises. Les violences de l’armée birmane contraignent les Rohingya à un exode massif au Bangladesh. En trois mois quelque 700 000 Rohingya quittent la Birmanie pour se réfugier dans le pays voisin, s’installant dans des camps de fortune près de la frontière.

L’ONU dénonce rapidement les persécutions exercées par le régime birman envers les Rohingya. Dès le 11 septembre 2017, le haut-commissaire de l’ONU aux droits humains, Zeid Ra’ad Al Hussein, parle d’un « exemple classique de nettoyage ethnique ». Malgré les dénégations de la junte militaire installée au pouvoir en Birmanie, les preuves s’accumulent d’une opération de nettoyage ethnique contre les Rohingya. Dans un rapport publié le 18 octobre 2017, Amnesty International décrit d’aillleurs « une campagne systématique, planifiée et impitoyable », identifiant au moins six crimes constitutifs de « crimes contre l’humanité » : « le meurtre, la déportation, la torture, le viol, la persécution et d’autres actes inhumains tels que la privation de nourriture ». Zeid Ra’ad Al Hussein va jusqu’à déclarer, en décembre 2018, qu’il existe des « éléments de génocide » des Rohingya par les militaires birmans.

Le Conseil de sécurité des Nations unies, divisé, ne parvient toutefois pas à freiner la répression contre cette minorité musulmane. Par ailleurs, Aung San Suu Kyi, lauréate du prix Nobel de la Paix en 1991 et icône pour son combat en faveur de la démocratie en Birmanie (voir Révolte des bonzes en Birmanie en 2007), devenue ministre des Affaires étrangères en 2016, se voit fortement critiquée par la communauté internationale et les ONG en raison de son absence de réaction contre les exactions de l’armée.

En juillet 2019, la procureure de la Cour pénale internationale, Fatou Bensouda, demande l’autorisation de conduire une enquête sur les crimes contre l’humanité conduits contre les Rohingya pour « déportations forcées ». À ses yeux, l’armée birmane a en effet « déplacé de force au moins 700 000 Rohingya depuis la Birmanie, où ils se trouvaient légalement, jusqu’au Bangladesh. »

Éclairage média

Par Christophe Gracieux

Consacré à l’exode des Rohingya, victimes de persécutions en Birmanie, ce reportage a été diffusé dans le journal télévisé de vingt heures de France 2 le 12 septembre 2017, soit près de trois semaines après le début des violences commises par l’armée birmane contre cette minorité musulmane.

Ce long reportage, d’une durée assez inhabituelle de cinq minutes, a été réalisé au Bangladesh, à la frontière avec la Birmanie, par les envoyés spéciaux de France 2, le grand reporter Nicolas Bertrand et le journaliste reporter d’images Thomas Donzel, tous deux membres du bureau de France 2 à New Delhi, en Inde. L’ensemble de leurs images ont été filmées sur le territoire du Bangladesh, la zone dans laquelle vivaient les Rohingya en Birmanie étant interdite d’accès aux journalistes par l’armée birmane.

Ce reportage cherche d’abord à expliquer l’exode des Rohingya. Cette crise est en effet très méconnue de l’opinion française : elle n’a pas fait l’objet d’une grande couverture médiatique malgré l’ampleur de la répression et de la crise humanitaire. Le journal télévisé de France 2 n’aborde d’ailleurs la question des Rohingya qu’à la vingt-et-unième minute de son édition du 12 septembre 2017. Nicolas Bertrand s’emploie donc à mettre en perspective l’exode de cette minorité musulmane. Pour ce faire, il illustre son commentaire d’images factuelles de destructions commises par l’armée birmane dans un village rohingya. Il s’agit d’images amateurs filmées par des Rohingya, sans que l’on sache comment l’équipe de France 2 se les sont procurées (« voici quelques images que nous avons reçues de leur village »). Il explique également le début de la répression par des images des rebelles rohingya se mettant eux-mêmes en scène : l’armée birmane a pris prétexte de l’attaque de postes de police par des rebelles le 25 août 2017 pour lancer des représailles contre les Rohingya.

Toutefois, la plus grande part du sujet prend la forme d’un reportage sur le terrain, aux côtés des réfugiés. Alternant images factuelles et interviews, il vise à montrer les conditions dans lesquelles s’effectue l’exode des Rohingya. Nicolas Bertrand et Thomas Donzel ont suivi ces exilés au cours de leur fuite et de leur arrivée au Bangladesh. Ils filment ainsi leur traversée du fleuve Naf, frontière entre la Birmanie et le Bangladesh, à bord de barques. Nicolas Bertrand est lui-même filmé en situation, au bord du fleuve, devant les barques chargées de réfugiés. Le reportage donne également à voir la précarité de leur situation au Bangladesh : les Rohingya sont installés dans des abris de fortune au bord des routes et dans des camps de fortune couverts de bêches de plastique. Plusieurs vues aériennes de camps de réfugiés à perte de vue, sans doute prises depuis un drone, attestent de l’ampleur de l’exode.

Le reportage comprend plusieurs témoignages de Rohingya sur la répression qu’ils ont subie en Birmanie. Dans Ouest-France du 5 octobre 2018, Nicolas Bertrand déclarait à propos de ces témoignages : « Difficile de garder les pieds sur terre face à ce désarroi et ces témoignages insoutenables. Nous sommes restés une dizaine de jours pour dépasser l’émotion et mener une vraie enquête. (…) Ce n’est qu’au quatrième jour que nous avons posé les questions que l’émotion retenait. » L’un des témoignages recueillis pour le reportage diffusé le 12 septembre 2018 est plus particulièrement poignant : « Leur objectif est de nous tuer, ils veulent tuer tout le monde », déclare une Rohingya, soulignant la dimension génocidaire de la répression menée par l’armée birmane.

Nicolas Bertrand et Thomas Donzel ont réalisé plusieurs sujets sur les Rohingya. L’un de leurs reportages, réalisé pour le magazine Envoyé spécial, « Rohingya : les damnés de Birmanie », leur a valu de remporter le Prix de Bayeux des correspondants de guerre dans la catégorie TV grand format en 2018.

Lieux

Thèmes

Sur le même thème