Vidéo
Proposé par Institut national de l’audiovisuel
Date de diffusion : 03 mai 1974
Dans le cadre de la campagne officielle télévisée, Jacques Chaban-Delmas, candidat gaulliste à l'élection présidentielle de 1974, se définit par rapport aux autres candidats.
Niveaux et disciplines
Informations et crédits
- Type de ressource :
- Forme :
- Collection :
- Date de diffusion du média :
- 03 mai 1974
- Production :
- INA
- Page publiée le :
- 2003
- Modifiée le :
- 29 juin 2023
- Référence :
- 00000000133
Contexte historique
Après avoir activement participé à la Résistance pendant la Seconde Guerre mondiale, Jacques Chaban-Delmas est élu député de l'Assemblée nationale en 1946, puis maire de Bordeaux en 1947. Plusieurs fois ministre sous la IVe République, il devient Premier ministre sous Georges Pompidou (1969-1972).
Dès son entrée à Matignon, il promeut son projet de "nouvelle société". Au centre de ce projet : résoudre les antagonismes idéologiques qui opposent les électorats et rassembler l'ensemble de l'opinion derrière un projet commun de société moderne et de progrès, réformatrice et pacifique, dont le point d'équilibre se situerait au centre. Dégagé de ses obligations ministérielles, Jacques Chaban-Delmas poursuit la promotion de ce projet et se présente comme un candidat virtuel à la présidence de la République. Le 4 avril 1974, il entre en lice. Il croit alors pouvoir bénéficier de l'appui de l'UDR et des centristes. Mais, à l'UDR, une partie de la jeune garde gaulliste (Jacques Chirac et Marie-France Garaud notamment) soutient Valery Giscard d'Estaing.
Durant la campagne, Chaban-Delmas a beau se faire le champion de l'ouverture, d'un "ni droite ni gauche" qu'il pense rassembleur, il est en décalage avec la bipolarité dominante du paysage politique français et il ne peut concurrencer la popularité de Valéry Giscard d'Estaing. Ses 15,1% au premier tour constituent un échec. Il se retire alors un temps sur ses terres bordelaises.
Éclairage média
Deux jours avant le premier tour, Jacques Chaban-Delmas prononce sa dernière allocution télévisée officielle. Il y montre une maîtrise certaine soulignant, in fine, l'importance que la télévision est en train de prendre dans les stratégies de communication et de conquête politique. Il doit cette facilité à son affabilité naturelle, à son expérience des médias, en tant que Premier ministre notamment, mais aussi à Michel Bongrand, son conseiller de campagne.
Publicitaire à la tête de l'agence MBSA, celui-ci est un de ceux qui impose en France un milieu professionnel de conseil en image aux hommes politiques. En 1965, Michel Bongrand s'occupait déjà de l'image de Jean Lecanuet. En 1974, "fort de sa réputation de précurseur, il travaille pour Jacques Chaban-Delmas". Ce dernier montre une réelle aisance devant la caméra : son discours est fluide, entrecoupé de pauses, son regard va vers le téléspectateur, introduisant ainsi un rapport direct avec l'électeur. Plus largement, il profite de son allocution pour porter un message simple, de logique gaullienne : moi ou le chaos. Il réfute l'importance des sondages, outil de l'arsenal d'analyse pré-électorale dont la place ne cesse de croître. Certes, le candidat gaulliste n'arrivera qu'en troisième position, au terme d'une campagne jugée finalement "médiocre". L'art de la communication télévisuelle n'est pas tout !
D'autant, l'audience moyenne à l'heure de la diffusion des allocutions officielles d'avant premier tour (de 20h35 à 21h05) fut de 45 à 50% contre 65-70% sur le reste de l'année. Ceci permet de rappeler qu'il faut pondérer toute analyse affirmant la primauté de la télévision dans le choix électoral. Dès la fin des années 1940 plusieurs scientifiques montraient d'ailleurs que l'influence de la radio sur les comportements électoraux était sélective et non toute puissante. Trente ans plus tard, l'influence de la télévision sur ces mêmes comportements ne lasse pas, parfois, de surprendre et semble donc largement insaisissable.
Bibliographie :
Agnès Chauveau, "L'homme politique et la télévision : l'influence des conseillers en communication", Vingtième Siècle, revue d'histoire, oct-dec 2003, n°80.
Gilles Le Béguec, "Jacques Chaban Delmas", in Sirinelli Jean-François (dir.), Dictionnaire historique de la vie politique française, PUF, 1995, p.164.
Sophie Bachmann, Histoire politique et sociale de la réforme de la radio-télévision en 1974, IEP Paris, 1985, p.205. (repris dans L'Eclatement de l'ORTF, L'Harmattan, 1997)
Lazerfeld P. e.a., The people's choice, New York, Columbia University Press, 1948
Katz E., Lazerfeld P., Personal influence, Free Press, Glencoe, 1955.