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Jacques Tati explique Playtime

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 28 sept. 1967 | Date d'évènement : 08 sept. 1967

Jacques Tati explique que, avec le film Playtime, il veut apporter de l'humour là où les gens vivent. Il veut adapter ses gags à la modernité et défendre en même temps les artistes méconnus.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de l'évènement :
08 sept. 1967
Date de diffusion du média :
28 sept. 1967
Production :
INA
Page publiée le :
2005
Modifiée le :
09 janv. 2024
Référence :
00000000504

Contexte historique

Par Carole Robert

Ancien artiste de music-hall, Tati réalise et interprète son premier long-métrage à 42 ans en 1947 : Jour de fête ne trouve pas de distributeur avant 1949 ! Son premier film fait pourtant l'unanimité dans la critique et auprès du public. Devant le succès du film (primé Grand Prix du Cinéma français), le producteur Fred Orain propose de tourner la suite des aventures du facteur : Tati refuse et invente le personnage de M. Hulot, personnage burlesque, poli, lunaire et maladroit, un clown beaucoup moins ancré dans la France, dans son métier et dans la réalité que le personnage du facteur.

Tati conserve le personnage de M. Hulot découvert en 1953 dans Les vacances de M. Hulot pendant quatre films consécutifs. Avec Mon oncle, Tati, qui appartient à cette catégorie de réalisateurs inclassables d'un cinéma d'auteur populaire, accède à une célébrité mondiale (Oscar du meilleur film étranger, 1959). Le succès extraordinaire des trois précédents films pousse Tati à réaliser Playtime, film radicalement nouveau, tourné en 70 millimètres, extrêmement sophistiqué et coûteux. Ce film l'accapare pendant neuf ans. Playtime est un monde : celui de la rationalité et de la globalisation poussées à l'extrême, quitte à détruire les individualités (foule des sosies de M. Hulot).

Même le burlesque doit se démocratiser selon Tati ; il estime que le cinéma comique a la fâcheuse tendance d'élire "deux ou trois professionnels du rire" par film, alors que tout personnage peut avoir une présence visuelle burlesque. Ainsi dans Playtime, film sans véritable héros, chaque gag est préparé avec une précision méticuleuse, chaque gestuelle est travaillée avec la rigueur de la pantomime, et la bande sonore est construite comme un fond sonore extrêmement organisé d'où émergent quelques dialogues .

Malheureusement, en plaçant son statut d'acteur vedette au second plan pour privilégier la mise en scène, Tati perd en audience. Le film fait moins d'entrées qu'il ne l'espérait, de Funès vole la vedette à M. Hulot. Le film ne sort pas du tout aux Etat-Unis. Ruiné, Tati met aux enchères sa maison familiale, perd ses droits sur ses films et ne tournera plus que deux longs-métrages : Trafic (1971) et Parade (Suède, France). Il sera récompensé en 1977 par un César d'honneur, cinq ans avant sa mort.

Éclairage média

Par Carole Robert

Avec un tel reportage, on se demande : M. Hulot ressemble-t-il à Tati ? Le trop grand M. Hulot, avec ses pantalons trop courts, sa pipe, son parapluie, son imperméable et son chapeau a une silhouette immortalisée par les affiches de Pierre Etaix, également créateur de gags pour Playtime. D'où vient ce choix du nom "Hulot" ? Le mot hulot est phonétiquement associé à celui d'hublot (désir de voir, surveillance), à hulotte (oiseau aux grands yeux ronds), à youlo (ce qui en russe veut dire toupie), à youlit, (balancer, hésiter). Il réunit donc beaucoup de caractéristiques du personnage, qui a une démarche "balancée", un air étonné, un côté hésitant et qui observe bizarrement autour de lui tout en étant totalement décalé... M. Hulot pointe le doigt sans le vouloir sur les incohérences du monde qui l'entoure.

Quant à Tati, il se présente comme un observateur attentif de la société moderne : il l'explique d'ailleurs sérieusement au journaliste dans l'interview qu'il accorde. Il parle de la "dimension" de la modernité qu'il regarde sans aménité ("dure, rapide, du bruit, méchant"). Le choix d'être interviewé dans un parking n'est pas un hasard : il est cohérent avec le sens du film Playtime. Dans son film, Tati cherche en effet à trouver une forme d'humour indissociable de l'évolution des techniques et des mentalités liées à la modernité, et il applique ce principe à la vie réelle en étant interviewé sur fond de voiture dans un parking moderne. Le reportage est ensuite mis en scène : on voit Tati jouer le "petit personnage qu'il est resté", dans une saynette avec un chien sur un fond sonore où on l'entend siffloter : il s'agit de se rapprocher du téléspectateur et de le toucher en jouant sur l'émotion et le rire.

Dans les dernières scènes, qui montrent en plongée l'impressionnant chantier de l'immense studio-ville, on comprend que Tati est perfectionniste et obsessionnel : il surveille la mise en place du décor, et commence même à s'y promener en prenant son personnage de M. Hulot. Son idée est en effet de faire construire le décor gigantesque d'une ville ultramoderne dans laquelle M. Hulot sème pagaille et trouble au gré de ses rencontres dans un dédale de couloirs et d'ascenseurs.

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