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Le Molière d'Ariane Mnouchkine

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 17 avr. 1977

En plein tournage, Ariane Mnouchkine s’explique sur le Molière qu’elle est en train de réaliser.

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
17 avr. 1977
Production :
INA
Page publiée le :
2006
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000000596

Contexte historique

Par Vincent Casanova

L’art dramatique fut l’un des instruments privilégiés de l’expression artistique en Mai 68, notamment par son rapport quasiment consubstantiel au politique depuis les tragédies antiques. Dans la continuité de cet événement, de nombreuses compagnies, jusqu’alors sans statut ni lieu, comme "Le Théâtre du Soleil" fondé par Ariane Mnouchkine en 1964, se forment au cours des années 1970.

Le prestige de la création théâtrale dans la vie culturelle française peut expliquer en partie cet engouement. Ces jeunes compagnies entendent promouvoir un théâtre différent dans ses modes économiques de production ainsi que dans sa qualité artistique : déconstruction du récit, prolongement des actions hors du champ de vision, intégration du spectateur dans le spectacle, investissement de lieux inhabituels. Il s'agit de faire du théâtre une aventure collective, non sans l'utopie de parvenir à changer le monde. Pour cela, le Théâtre du Soleil par exemple est organisé en coopérative ouvrière, c'est-à-dire que tous les membres sont payés de la même façon et que tout le monde participe également à son fonctionnement, personne n'échappant aux tâches ménagères notamment. La place accordée à l'improvisation et aux acteurs dans la constitution des spectacles procède du même principe. Il s'agit dans le même temps de redonner toutes ses lettres de noblesse à la notion de "troupe". Son installation en 1970 à la Cartoucherie de Vincennes, d'anciens entrepôts militaires abandonnés aux portes de Paris, a favorisé le développement de cette expérience. Elle la continue encore aujourd'hui, résolument.

Très marquée esthétiquement par son séjour en Asie où elle découvrit les pratiques orientales du théâtre, Ariane Mnouchkine conçoit par ailleurs son travail comme indissociable de son engagement sur la place publique. Ses spectacles sont une adresse à la société. Avec 1789 et 1793 par exemple, Mnouchkine, dans l’après-68, interroge les conditions de possibilité d’une révolution. De la même manière, son souci de revisiter les classiques du répertoire, du cycle des Atrides d’Eschyle et Euripide à Richard II de Shakespeare en passant par le Tartuffe de Molière, s’inscrit délibérément dans une volonté de théâtre populaire.

C'est dans cet esprit qu'elle entreprit, avec des moyens exceptionnels, à partir de 1976, de raconter au cinéma la vie de Molière, interprété par Philippe Caubère. Le film nécessita deux ans de tournage. Mnouchkine y retrace, pendant plus de 4 heures, la vie de l'homme de théâtre que fut Molière, consacrant plus de la moitié du film quasiment à son enfance et à ses années de théâtre ambulant. Mais elle y réfléchit également sur l'avènement d'un État absolutiste et sur le rôle de Louis XIV comme protecteur des arts. Pour toutes ces raisons, le film fut assez mal reçu par la critique : on lui reprocha l'importance donnée aux scènes de théâtre de rue, au détriment d'un portrait centré sur la figure de l'écrivain, telle que l'histoire, académique et scolaire, l'avait figée depuis des années.

Éclairage média

Par Vincent Casanova

Jusqu’à l’avènement du DVD et de la caméra numérique, il était bien rare de conserver les images d’un tournage. Le reportage consacré au Molière que réalise Ariane Mnouchkine s’explique en particulier par l’aide financière qu’apporte Antenne 2, ancien nom de France 2. Il s’agit ainsi de faire tout à la fois la promotion d’un film qui s’annonce exceptionnel par les moyens mobilisés le commentaire insiste bien sur son aspect de "superproduction" et de rappeler l’investissement du service public dans la création d’oeuvres nouvelles. Grande consommatrice de film, la télévision devient, à partir de la fin des années 1970 et surtout au cours des années 1980, la principale source de financement du cinéma français.

Le film, sorti dans à peine 6 salles, connut une deuxième vie grâce à la télévision qui le diffusa en 5 cinq parties d'une heure en 1980 ; cela lui permit ainsi de trouver un public beaucoup plus large. Tel un petit making-off, ce sujet cherche avant tout à rendre l'ambiance du tournage ; il fait d'Ariane Mnouchkine un personnage original dont le discours ouvertement politique n'aurait sans doute jamais pu être relayé avant la libéralisation de l'information par Valéry Giscard d'Estaing.

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