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Le maser à ammoniac au Laboratoire de l'horloge atomique

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 04 sept. 1962

En 1962, une visite au Laboratoire de l'horloge atomique présente les différents composants de la première horloge atomique de France, le maser à ammoniac qui utilise la technologie de l'amplification micro-onde à émission stimulée de rayonnement.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
04 sept. 1962
Production :
INA
Page publiée le :
2006
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000000624

Contexte historique

Par Christelle Rabier

L'invention du maser (Microwave Amplification by Stimulated Emission of Radiation, pour Amplification des Micro-ondes par Emission Stimulée de Rayonnement) en 1954 s'inscrit dans le contexte de la guerre froide. La Seconde Guerre mondiale a vu l'explosion de la technologie du radar. La recherche dans ce domaine était parvenue pendant la guerre à réduire la longueur des ondes utilisées, de 10 cm à 1 cm, ce qui permettait à la fois de réduire la taille des appareils utilisés et d'accroître la qualité du signal. Or, en deçà de 1,25 cm, la qualité du signal s'avère très perturbée par l'environnement qui absorbe les ondes et rend difficile leur perception.

Dans un contexte de concurrence avec l'Union soviétique, la recherche dans un domaine comme celui des micro-ondes, d'une longueur d'onde de l'ordre du millimètre, s'avère stratégique pour l'armée des deux pays. Promettant un plus grand secret pour les communications à courte distance, elles constituaient un avantage sur l'ennemi. C'est pourquoi, aux Etats-Unis et en URSS, des programmes sont créés après la guerre, associant militaires et physiciens de la matière. Ces recherches concurrentes sont couronnées par le Prix Nobel de physique de 1964, qui récompensent l'Américain Charles Townes et les Soviétiques Basov et Prokhorov, pour leurs résultats sur les lasers et les masers.

La génération de micro-ondes est finalement réussie en combinant des résultats de la théorie quantique et la technologie des oscillateurs. Depuis le début du XXe siècle, la théorie quantique a mis en évidence que les atomes peuvent absorber et émettre une quantité spécifique d'énergie, sous la forme de photons. Si l'on considère un atome, composé d'un noyau autour duquel gravitent des électrons, ce sont les électrons qui captent ou restituent cette énergie, en passant d'un niveau d'énergie à un autre. Ce phénomène a été mis en évidence en 1913 par Niels Bohr : les atomes disposent de niveaux d'énergie quantifiés, entre lesquels les électrons peuvent transiter. Lorsqu'ils passent d'un niveau supérieur d'énergie x à un niveau inférieur y, ils émettent un photon, dont la longueur d'onde dépend de la différence de quantité d'énergie entre les niveaux x et y. Ce phénomène, spontané, peut être toutefois provoqué : si l'on excite par une émission de photons d'une longueur d'onde spécifique, représentant l'énergie exacte de l'électron dans un niveau supérieur, celui-ci contribuera d'un photon au faisceau de photons en redescendant à un niveau inférieur d'énergie. Ce photon est exactement identique au photon bombardé, par sa longueur d'onde et par sa phase. C'est le phénomène d' " émission stimulée " découvert par Albert Einstein en 1917.

Le principal problème à résoudre était que l'émission stimulée est en compétition avec d'autres modes d'interaction de la lumière avec les atomes, en particulier l'absorption, phénomène symétrique de l'émission de photons. L'idée statistique à laquelle les chercheurs arrivent est qu'il est besoin, pour que l'effet recherché se produise, d'une " inversion de population " d'atomes, c'est-à-dire qu'une majorité d'atomes se trouve dans un état excité de façon à ce que l'effet d'émission l'emporte sur l'effet d'absorption. Cette situation est difficile à réaliser.

Les connaissances de Townes et de ses collègues dans la technologie radar leur ont permis de développer un appareil permettant de produire une fréquence maser, acronyme anglais pour amplification micro-onde à émission stimulée de rayonnement. Le choix de la molécule d'ammoniac qu'ils utilisent s'explique par leurs propres questions scientifiques. L'idée de Townes met toutefois du temps avant d'être acceptée : le phénomène d' " émission spontanée ", en effet, n'est jusqu'alors envisagé que dans sa dimension de particule, sans que les physiciens en aient vu les conséquences sur la dimension ondulatoire de la lumière. L'appareil de Townes, fabriqué en 1954, relie une source d'ammoniac à un " focaliseur " qui joue le rôle d'une lentille sur le faisceau de photons et à une cavité micro-ondes qui conserve l'énergie communiquée préalablement aux molécules et leur ajoute de l'énergie haute-tension, de façon à provoquer l'émission stimulée attendue.

Le maser trouve rapidement des applications, en particulier l'amplification des ondes. Il représente également une alternative intéressante pour mesurer le temps avec une très grande précision, en raison de la qualité de son résonateur. Celui-ci joue un rôle déterminant pour la précision et la stabilité de la mesure du temps. Jusqu'à la fin des années 1940, la mesure précise du temps est assurée par l'horloge à quartz, conçue en 1929-1930. Pour concevoir un résonateur quasi-parfait, ils utilisent les propriétés du cristal, propriétés connues depuis les travaux des frères Jacques et Pierre Curie en 1880. Jouissant de propriétés élastiques intéressantes qui lui permet de vibrer à des fréquences très stables, le quartz a également des propriétés piézo-électriques, c'est-à-dire qu'il est susceptible de se polariser électriquement sous l'effet d'une pression mécanique. En soumettant le quartz à une tension électrique alternative, ils provoquent par effet mécanique sa mise en résonance. Enormes armoires à leur création, les horloges à quartz restent dans les années 1950 des instruments de précision relativement rares, avant la mise au point en 1966-1967 par le Centre électronique horloger de Neuchâtel du premier résonateur à quartz pour montre.

Dans la recherche après-guerre en métrologie (science de la mesure), les horloges atomiques qui utilisent les transitions entre niveaux d'énergie des atomes sont pressenties comme pouvant apporter des progrès décisifs à la mesure du temps : elles présentent l'avantage d'une grande stabilité à long terme et d'une reproductibilité qui ne peut être atteinte avec aucun autre dispositif utilisant une résonance mécanique, acoustique ou électrique. Le National Office of Standards (Bureau national de métrologie) construit ainsi en 1949 une horloge à absorption d'ammoniac. Au début des années 1950, alors que les recherches se poursuivent pour concevoir une horloge à césium, l'invention de Townes représente bientôt une alternative extrêmement fiable à cette technologie et est bientôt utilisé comme chronomètre.

C'est pourtant l'autre technologie d'horloge atomique qui permet la mise au point d'un étalon pour la seconde. En 1958, fut créée au Canada, la première horloge atomique à jet de césium 133, ayant une précision de l'ordre de quelques millionièmes de seconde par an. C'est cette technologie qui fut adoptée pour donner une définition " naturelle " de la seconde, comme un multiple de la fréquence du césium. Cette unité de base du système international est officialisée en 1967 par la Conférence générale des poids et mesures.

Bibliographie :

Joan Lisa Bromberg, The Laser in America, 1950-1970, Boston, MIT, 1991.

Éclairage média

Par Christelle Rabier

L'émission " En direct de " présente la vie des régions, ici celle de Besançon. La région de Franche-Comté, en particulier avec Saint-Claude et Besançon, à proximité de Neuchâtel, sont à la pointe de l'industrie horlogère française. C'est cette spécialité qui a conduit à la création du Laboratoire de l'horloge atomique, qui dépend du Centre national de la recherche scientifique, créé en 1945. Le présentateur, peu spécialiste des questions scientifiques, suit pas à pas l'ingénieur dans les différentes opérations qui conduisent à la production de micro-ondes à fréquence stable. Le discours préparé de l'ingénieur aux commandes est très technique, peu adapté à une présentation pédagogique. Le présentateur, Jean-François Lalet joue le rôle d'un " prompteur ", dont les questions permettent à l'ingénieur d'exposer les différentes étapes de l'expérience. La mise en scène insiste sur la dimension spectaculaire de l'instrument, avec des plans fixes sur les vapeurs de l'azote liquide et les cadrans.

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