Le Toyotisme : une nouvelle forme de l'organisation du travail

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 05 nov. 1998

La société japonaise Toyota a développé un mode original d'organisation du travail. Elle repose à la fois sur une forte discipline collective et un apparent épanouissement personnel. Le sport y joue un rôle très important.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Envoyé spécial
Date de diffusion du média :
05 nov. 1998
Production :
INA
Page publiée le :
2006
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000000695

Contexte historique

Par Raphael Morera

A chaque système technique correspond une forme d'organisation et de rémunération du travail. Les innovations techniques, pour exister, doivent être acceptées par un système social préexistant et qu'elles contribuent à modifier. Les sociétés industrielles, dès le XVIIIe siècle, se sont employées à briser des formes anciennes de solidarité entre ouvriers, comme les corporations. Au cours du XIXe siècle, le monde du travail est marquée par la très grande liberté laissée aux entrepreneurs. Dès le début du XXe siècle, les choses évoluent en faveur des salariés auxquels on assura un certain nombre de droits sociaux. L'organisation concrète du travail fait jusque là l'objet de réflexions qui ne sont pas encore érigées en système de production théorisé.

La première rupture vint de Taylor qui formalisa le premier le système de production industrielle qui allait dominer le XXe siècle. Les tâches doivent être simplifiées et confiées à des ouvriers peu qualifiés qui doivent reproduire inlassablement les mêmes gestes. Cette manière de concevoir le travail fut en son temps tournée en dérision dans Les Temps modernes de Charlie Chaplin. Le taylorisme fut par la suite complété par le fordisme. Théorisé par le patron automobile, il allie au mode de production taylorien un niveau de rémunération suffisamment élevé pour que les ouvriers puissent eux-mêmes acheter leurs productions. Taylorisme et fordisme servirent de modèle d'organisation du travail jusqu'aux années 1960, ils accompagnèrent donc les Trente glorieuses.

Ils furent tous deux battus en brèche sous l'effet des bouleversements technologiques et notamment du perfectionnement des machines-outils. Ces dernières nécessitent en effet l'emploi d'une main d'oeuvre beaucoup plus qualifiée et instruite qui ne peut se satisfaire du sort réservé à leurs prédécesseurs. Très précoces dans ce domaine, les Japonais, et notamment la firme Toyota, ont dès les années 1970 développé de nouvelles formes d'organisation du travail qui ne furent que progressivement découvertes et appliquées en France dans les années 1980.

Le toyotisme repose essentiellement sur le passage du travail à la chaîne au travail en équipe. Chaque ouvrier participe à l'intégralité du processus de production d'une automobile. Cela suppose la polyvalence de chaque ouvrier et un travail d'équipe coordonné et donc une relative indépendance des équipes comme des ouvriers. L'ouvrier est intégré à l'entreprise par le biais de son équipe de travail qui lui fixe ses objectifs de production. L'organisation de son travail se rapproche de plus en plus de celui des cadres. Les ouvriers sont invités à développer leur esprit d'initiative au sein de l'équipe et si possible à en faire profiter l'ensemble de la société. Le sport et les loisirs jouent donc un rôle important car ils participent à l'épanouissement des salariés, et donc à la prospérité de l'entreprise. Ce système fonctionne également grâce au très grand attachement des Japonais à leur entreprise et à l'importance du modèle de l'emploi à vie. Même s'il masque mal le maintien de l'autorité traditionnelle, il s'est accompagnée de réel gain de productivité, si bien qu'en 2006 Toyota est en train de devenir la première firme automobile mondiale aux dépens de General Motors.

Bibliographie :

Koichi Shimizu, Le toyotisme, Paris, La Découverte, 1999, 118 p.

Éclairage média

Par Raphael Morera

Laisser filmer le travail n'est pas toujours très intéressant pour une société qui souhaite promouvoir son image à travers le monde. Toyota n'a ainsi laissé voir de son usine à l'équipe de journaliste envoyée au Japon que des ouvriers en tenue de sport en train de faire leur jogging quotidien. Ce n'est qu'à la dérobée qu'ils peuvent saisir une image de formation au ton très martial. Cette séquence, tournée sur un terrain de football vétuste, en bordure d'une voie de chemin de fer et dans un vacarme routier met en scène des ouvriers dociles aux habits ternes. Elle représente sans doute ce que les journalistes aimeraient montrer de Toyota.

Cette vision, un peu sombre qui embarrasse la direction de l'usine, est vite compensée par un entretien avec un ouvrier en pleine séance d'entraînement de golf. Apparemment décontracté, il vante les mérites de sa société dans un lieu complètement décalé pour évoquer ce sujet. Il diffuse visiblement une image convenue et officielle de son entreprise. La réussite économique passe en effet par l'image qui doit être étroitement contrôlée pour ne pas servir d'arme aux concurrents. Le journaliste n'est pas dupe de ce jeu mais accepte d'y prendre part dans l'espoir d'amener le télespectateur à tirer ses propres conclusions.

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