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Les Rolling Stones à Paris

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 29 mars 1966

Les Rolling Stones, de passage à Paris, répondent à quelques questions dans le journal télévisé.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
29 mars 1966
Production :
INA
Page publiée le :
23 sept. 2008
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001230

Contexte historique

Par Stéphane Ollivier

Groupe britannique fondé en 1962 de l'association de Mick Jagger au chant, Keith Richards et Brian Jones la guitare, Bill Wymann à la basse et Charlie Watts à la batterie, les Rolling Stones sont entrés immédiatement dans la légende du rock en participant activement au milieu des années 60, au même titre que les Beatles, les Kinks ou les Who, à l'avènement puis à l'hégémonie du rock anglais sur la scène pop internationale. Dès leur premier single en 1964, associant une reprise de Chuck Berry à un vieux blues de Willie Dixon, les Rolling Stones se singularisent en apportant un son nouveau, résolument ancré dans la musique populaire noire-américaine. Mais c'est surtout leur attitude dandy, juvénile et irrévérencieuse, magistralement incarnée par leur leader charismatique Mick Jagger, qui aussitôt attire l'attention et fait scandale. Dès leurs premières prestations publiques les Rolling Stones, dans leur duel à distance avec les Beatles, apparaissent comme les "mauvais garçons" du rock - une image qui leur collera à la peau. Musicalement c'est le temps des premiers chef-d'œuvres. Alternant vieux classiques de blues, reprises de hits soul à la mode (Marvin Gaye, Sam Cooke, Otis Redding) et chansons originales composées par le couple Jagger-Richards, des disques comme 12x5 (1964), The Rolling Stones now ! (1965) ou encore Out of Our Heads (avec son tube interplanétaire, Satisfaction ) posent d'emblée les bases d'un style sec et hargneux, fondé essentiellement sur les riffs dévastateurs de la guitare de Keith Richards et les intonations boudeuses de Jagger.

Mais c'est en 1966 avec l'album Aftermath, entièrement composé de chansons originales, que les Stones signent leur premier grand disque, élargissant les limites stylistiques de leur univers en introduisant dans leurs orchestration les influences du psychédélisme à la mode. Très bien accueilli par la critique qui le compare au Revolver des Beatles, cet album ouvre une période d'extraordinaire créativité pendant laquelle le groupe va accumuler les chef-d'œuvres, entrés depuis dans l'histoire du rock comme des classiques indémodables. Between the Buttons (1967), Their Satanic Majesties Request, Beggars Banquet (1968), ou encore Let it Bleed (1969) - dernier album auquel collabore Brian Jones avant sa disparition tragique - imposent définitivement aux yeux du monde une musique violente et mélodique, sensuelle et provocatrice, branchée comme nulle autre alors sur les pulsations de l'époque. A cet instant les Rolling Stones, par cette faculté à introduire dans leur univers des orchestrations de plus en plus raffinées sans rien abandonner de leur énergie adolescente, sont incontestablement le plus grand groupe de rock du monde. Deux nouveaux chef-d'oeuvres viennent confirmer cette hégémonie au début des années 70 : Sticky Fingers (1971), avec sa célèbre pochette dessinée par Andy Warhol, puis Exile on Main Street l'année suivante, premier double album de l'histoire du groupe fortement teinté de blues, sous l'influence de Mick Taylor, nouveau guitariste de la formation.

Mais le groupe, épuisé par des excès en tout genre - Sex, drugs and rock'n'roll - voit alors son inspiration fléchir. Les disques s'en ressentent, qui perdent en intensité et en qualité. En 1974, Mick Taylor quitte les Rolling Stones et est remplacé par Ron Wood - étape décisive marquant le déclin inexorable du groupe. Car si quelques disques viennent encore sporadiquement marquer les esprits comme Some Girls en 1978 intégrant/détournant habilement la mode disco (Miss You ), les Rolling Stones n'ont plus la flamme et se contentent dès lors de gérer leur image. Accumulant depuis bientôt 30 ans les disques tout à la fois habiles et insipides, simples prétextes aux tournées mondiales forcément triomphales et lucratives qui immanquablement s'ensuivent, les Rolling Stones sont devenus pour l'industrie du spectacle un label, une marque : le groupe emblématique de l'âge d'or du rock'n'roll. Si l'on peut regretter cette lente agonie créative, il n'en demeure pas moins qu'aujourd'hui les Rolling Stones sont entrés dans la légende et font incontestablement partie des quelques groupes incontournables de l'histoire de la musique populaire du XXe siècle.

Éclairage média

Par Stéphane Ollivier

Ce petit reportage diffusé le 29 mars 1966 dans le cadre du journal télévisé de la nuit n'aurait d'autre intérêt que purement anecdotique s'il n'offrait un éclairage intéressant sur le système médiatique de l'époque et la perception que l'on pouvait avoir en France à cet instant de l'émergence du rock'n'roll dans le champ culturel. On est d'abord surpris face à ces images éparses, comme saisies au vol un peu au hasard (en extérieur, lors d'une conférence de presse et du cocktail qui s'ensuit) puis mises bout à bout sans autre visée, dirait-on, que purement informative, de la relative tranquillité dont semblent jouir les Rolling Stones, alors pourtant en pleine ascension et présentés outre-manche comme les principaux rivaux des Beatles. Pas de foule hystérique, peu de photographes : l'ambiance est bon enfant et les quatre musiciens présents (le batteur Charlie Watts n'est pas là, ce qui peut laisser entendre que le groupe n'est pas à Paris à l'occasion d'un concert mais pour une simple rencontre avec la presse) se montrent d'une grande disponibilité.

Juvéniles, un peu timides, les Stones apparaissent bien loin de l'image de "mauvais garçons du rock" que l'on veut leur faire endosser, ce qui prouve que le système médiatique, encore balbutiant, qui s'emparera bientôt d'eux pour les transformer en rock stars planétaires, n'a pas encore formaté leur attitude. Il y a là beaucoup d'innocence et d'insouciance dans leurs relations aux médias - ce qui renforce le côté nostalgique de ces images...

Par ailleurs l'interview finale, par la futilité et l'orientation insidieuse des questions ("Êtes-vous des gens sérieux ?", "Faites-vous dans la vie uniquement ce que vous aimez ?") laisse poindre un certaine condescendance de la part du journaliste (le rock est une musique pas très sérieuse faire par des jeunes gens insouciants), assez symptomatique du retard que prendra l'intelligentsia française dans son ensemble à considérer le rock - et plus globalement la culture pop - comme un phénomène artistique majeur de la fin du XXe siècle.

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