Les Rita Mitsouko

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 05 janv. 1994

Sur la scène du "Cercle de minuit" les Rita Mitsouko interprètent Y'a d'la haine, titre extrait de leur nouveau disque Système D.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Le Cercle de minuit
Date de diffusion du média :
05 janv. 1994
Production :
INA
Page publiée le :
23 sept. 2008
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001240

Contexte historique

Par Stéphane Ollivier

Les Rita Mitsouko resteront dans l'histoire du rock français comme le groupe majeur des années 80/90. Sa musique hybride, lyrique, théâtrale et baroque, en mêlant chanson traditionnelle, grooves funk, rock d'inspiration anglo-saxone et fragrances sonores épicées venues du monde entier, contribua de manière décisive à ouvrir la musique populaire hexagonale au grand métissage "fin de siècle".

C'est au tournant des années 80 que Catherine Ringer (née à Suresnes en 1957), chanteuse au registre étonnamment vaste et varié (de l'éructation punk à la vocalise virtuose de diva kitch) et Frédéric Chichin (né à Clichy en 1954), compositeur et guitariste de rock, se rencontrent et décident de travailler ensemble sous le nom de Rita Mitsouko. Si le groupe attire d'emblée l'attention lors de ses prestations scéniques en cultivant une vraie folie et un sens de la provocation très rock'n'roll, son premier maxi de 4 titres (Don't forget the nite ) ne trouve pas son public. C'est en 1984 avec leur premier album éponyme que les Rita Mitsouko rencontrent d'un coup le succès grâce à un titre entré dans la légende du rock français, Marcia Baila. Cette chanson baroque aux grooves latinos et aux paroles à la fois crues et mélancoliques évoquant la disparition de la danseuse argentine Marcia Moretto des suites d'un cancer, s'impose de manière inattendue sur toutes les ondes et se vend à plus d'un million d'exemplaires. Forts de ce succès, les Rita Mitsouko se remettent au travail et sortent en 1986 leur deuxième album, The No Comprendo - peut-être le disque le plus inspiré et abouti de l'histoire du rock français. Enregistré sous la houlette du producteur britannique Tony Visconti, cet album est un feu d'artifice de tubes étincelants (Les histoires d'amour, C'est comme ça, Andy ) dans lequel les duettistes, parfaitement complémentaires, déploient dans toute sa démesure leur univers syncrétique et expérimental, d'une extrême modernité dans sa façon de mêler en orchestrations somptueuses tous les genres de la pop internationale. Les Rita Mitsouko s'imposent alors définitivement comme le groupe à la mode : Jean-Baptiste Mondino réalise leurs clips ; Jean-Luc Godard intègre dans son film Soigne ta droite (1987) une longue séquence de travail saisie lors de l'enregistrement du disque The No Comprendo. Même les clubs new-yorkais s'entichent des petits "frenchies". Mais leur troisième album, Marc et Robert (1988), toujours produit par Visconti, surprend le public par ses sonorités "dance" et une tonalité générale plus rock et minimaliste. Débute alors une période de retraite où le duo fait le point et régénère son inspiration. Il faudra attendre 1993 pour voir les Rita Mitsouko faire leur grand retour avec l'album Système D - disque ambitieux aux styles incoyablement variés, posant les bases de l'esthétique métissée que prendra leur musique toujours plus inclassable tout au long des années 90. En 1997 les Rita Mitsouko donneront une nouvelle preuve de cet éclectisme érigé en système musical en invitant à les rejoindre sur scène, l'espace d'une carte blanche offerte par la Cité de la Musique, des artistes aussi divers que le saxophoniste de free jazz Archie Shepp, les rappeurs du groupe Assassin ou encore le compositeur de musique concrète Pierre Henry.

Au début des années 2000 le groupe surprend de nouveau. En faisant paraître avec Cool Frénésie un album résolument pop intégrant aux éléments habituels de son univers des sonorités et des rythmes empruntés aux dernières tendances de la musique électronique. Mais aussi, en un contre-pied radical, en investissant en 2002 le Théâtre des Champs-Élysées en compagnie de l'Orchestre Lamoureux pour une relecture symphonique de l'essentiel de son répertoire, ainsi que de quelques chansons immortelles de Léo Ferré et Serge Gainsbourg. Si les Rita Mitsouko font encore paraître dans la foulée La femme trombone, Fred Chichin, affaibli par une hépatite C chronique, oblige le groupe à ralentir considérablement le rythme de ses concerts. C'est pourtant un duo régénéré qui surprend tout le monde en 2007 en faisant paraître avec Variety un disque inspiré et résolument rock renouant avec l'énergie et l'esprit iconoclaste des débuts. Les Rita Mitsouko n'auront malheureusement pas la chance de savourer cette nouvelle jeunesse : le 28 novembre 2007, Fred Chichin, décède prématurément, victime d'un cancer foudroyant. Après avoir poursuivie seule la tournée des Rita Mitsouko entamée avant la disparition de son compagnon, Catherine Ringer annonce le 22 juillet 2008 la fin officielle du groupe. Elle poursuit désormais sous son nom une carrière personnelle.

Éclairage média

Par Stéphane Ollivier

Cette séquence extraite de l'émission culturelle de Michel Field "Le Cercle de minuit" du 5 janvier 1994 rend compte d'un moment important de la carrière des Rita Mitsouko puisqu'il s'agit, avec la parution du disque Système D, de leur retour au premier plan, après cinq années de silence. Album charnière et décisif, systématisant le principe d'une esthétique de l'hybridation généralisée en multipliant les ouvertures à d'autres formes musicales, Système D va propulser les Rita Mitsouko dans les années 90, en amorçant le virage stylistique qui leur permettra de conquérir un nouveau public plus large et diversifié.

Après une prestation scénique de très grande qualité montrant un groupe parfaitement maître de son nouveau langage (mélange irrésistible de funk et de rock transcendé par la voix exceptionnelle de Catherine Ringer), l'interview qui suit déçoit. Digressant plaisamment au gré des interventions des invités, cet extrait, s'il donne un aperçu assez fidèle du ton très libre de l'émission qui cherche systématiquement à offrir de la culture une image décomplexée et dénuée de toute pédanterie, est tout à fait symptomatique d'une incapacité chronique de la télévision généraliste, lorsqu'elle cherche à sortir des logiques de promotions imposées par l'industrie du disque, à proposer un véritable discours critique sur la musique.

Parquée (dans le meilleur des cas) dans le ghetto d'émissions culturelles toujours plus spécialisées (musiques classique et contemporaine, jazz, hip hop, rock, musiques pop et électro), ou réduite à ses formes les plus consensuelles dans le cadre d'émissions de variété grand public, la musique, art systématiquement sous-estimé dans le système de valeurs français, demeure le parent pauvre de la télévision française.

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