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Daniel Spoerri au musée d'art moderne de Nice

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 11 juin 1990

A l'occasion de l'entrée des œuvres de Daniel Spoerri au Musée d'Art Moderne et d'Art Contemporain de Nice, France 3 Côte d'Azur revient sur quelques traits marquants de son œuvre ponctués par un entretien avec l'artiste.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
11 juin 1990
Production :
INA
Page publiée le :
26 nov. 2013
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001551

Contexte historique

Par Alexandre Boza

Daniel Spoerri est né Daniel Feinstein en 1930 à Galati, en Roumanie. Adopté par son oncle en 1942, il s'installe en Suisse sous le nom de Daniel Spoerri. Il apprend la danse classique et devient danseur étoile de l'Opéra de Berne de 1953 à 1957. Il développe en parallèle une démarche audacieuse de happening participatif : dans la revue Material fondée en 1957, le lecteur est invité à compléter les lacunes volontaires du travail de création de l'auteur ; dans le cadre de l'« autothéâtre » d'Anvers, avec Tinguely, il demande au spectateur d'être à la fois acteur et public. Avec les éditions MAT (Multiplication d'art transformable) qu'il fonde à Paris en 1959, Spoerri édite des œuvres signées par des artistes de renom, contestant l'idée d'œuvre d'art unique.

Daniel Spoerri entreprend réellement sa carrière artistique en 1959. En 1960, il fait partie des membres fondateurs des Nouveaux Réalistes avec entre autres Arman, Yves Klein, Jean Tinguely et Jacques Villeglé, derrière le critique Pierre Restany, et réalise sa première exposition personnelle en 1961.

Il prétend échapper à la dictature du beau, prendre la « réalité telle qu'elle est sans y changer la moindre miette de pain », comme dans ses Tableaux-pièges où des objets trouvés au hasard sont fixés tels quels. L'idée centrale des Nouveaux Réalistes est d'exploiter un art moderne, caractérisé par l'urbain, les médias, la technique et l'industrie. Ils proposent une approche « sociologique » de l'art qui délaisse les moyens habituels (toile et peinture) pour rechercher une « nouvelle expressivité » de la société sans volonté politique.

Spoerri récupère les déchets de cette société pour en faire des œuvres d'art en les intégrant à ses créations. Il pose à la verticale des reliefs de repas ou des fonds de tiroirs qu'il fixe avec de la résine Epoxy. Il passe ensuite aux Détrompe-l'oeil (1961) et aux Pièges à mots (1964) qui fonctionnent comme des illusions et questionnent la perception de la réalité.

En 1968, Daniel Spoerri ouvre un restaurant et une galerie à Düsseldorf, Eat Art, et édite des œuvres alimentaires d'Arman et César ainsi qu'une série de Tableaux-pièges alimentaires. Il ouvre également une « Eat-Gallery » à Francfort avant de se tourner vers des natures mortes contenant des cadavres d'animaux dans les années 1970.

Les années 1980 et 1990 sont des années de synthèse de son travail et révèlent un penchant pour l'étrange : il affine ses assemblages de rebuts en leur donnant une tonalité plus religieuse, constitue un « cabinet anatomique » inspiré par des planches médicales. En 1997, il inaugure sa Fondation Il Giardino di Daniel Spoerri : Hic Terminus Haeret à Seggiano en Toscane, où il reçoit ses amis plasticiens pour des interventions dans ses labyrinthes et son jardin de sculptures. L'une de ses interventions les plus célèbres reste le Déjeuner sous l'herbe : les restes d'un banquet sont enterrés en 1983 dans le parc du domaine de Montcel à Jouy-en-Josas dans les Yvelines et sont exhumés en 2010 et comparés scientifiquement pour mesurer la distance entre l'archéologie et la performance.

Éclairage média

Par Alexandre Boza

La présentation rapide de quelques-unes de ses œuvres introduit le travail de Daniel Spoerri. Son classement comme nouveau réaliste aux côtés d'Yves Klein tient au fait qu'il est un artiste du quotidien.

Spoerri travaille à la manière des artistes dada, posant la question du statut de l'oeuvre d'art. Ses Tableaux-pièges sont des trompes l'oeil. Ses assemblages sont assez proches de ceux d'Arman. Spoerri recycle divers objets du quotidien (couverts, journaux, outils) comme autant de traces de la civilisation occidentale qui questionnent son art. Il passe indifféremment de deux à trois dimensions, ajoutant des objets sur des tableaux ou installant les objets comme des créations, à l'instar d'une chaise exposée au mur.

Dans l'interview qu'il accorde à FR3 Côte d'Azur, Spoerri insiste sur l'idée qu'à l'époque des Nouveaux Réalistes, « on ne faisait pas de l'art uniquement avec la main, ou avec la tête, mais c'est un comportement, un mode de vie ». L'art est ainsi étroitement associée à la vie et il commente son œuvre Eat Art - un mélange de matériaux organiques qui déborde d'une machine - par une analyse anthropologique. Convoquant l'anthropologue Claude Lévi-Strauss, il explique que les tabous de nos sociétés s'expriment à table. Il voudrait également « croire mais n'y arrive pas », professant une réelle méfiance à l'égard du genre humain : « notre race humaine, on est les rats les plus dangereux sur ce monde ».

Filmé à Nice sur le cours Saleya après quelques achats lors de la brocante du lundi, il explique une partie de sa méthode. Il amasse des objets hétéroclites qu'il utilise à un moment donné dans ses créations « aujourd'hui, demain ou dans dix ans, je sais jamais vraiment ce que je fais tout de suite. Il y a des objets qui traînent vraiment 10 ans, 20 ans ». Il n'y a pas une spontanéité complète dans son travail mais plutôt une réflexion sur l'incorporation de ces objets qu'il collecte dans les œuvres qu'il réalise.

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