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Le discours de Pierre Mendès France à Évreux sur la crise de la démocratie (23 juillet 1955)

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 21 avr. 2012 | Date d'évènement : 23 juil. 1955

L’acteur Denis Podalydès lit deux extraits du discours de l’ancien président du Conseil, Pierre Mendès France, consacrés à la crise de la démocratie. Ce discours a été prononcé à Évreux le 23 juillet 1955.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de l'évènement :
23 juil. 1955
Date de diffusion du média :
21 avr. 2012
Page publiée le :
13 juil. 2021
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000004239

Contexte historique

Par Christophe Gracieux

Pierre Mendès France a profondément marqué l’histoire politique de la France du XXe siècle par son expérience gouvernementale et par ses conceptions institutionnelles novatrices. Né le 11 janvier 1907, il adhère, dès l’âge de 16 ans, au Parti radical. En 1932, il est élu député de l’Eure, devenant le plus jeune député de France. 

Arrêté le 30 août 1940 au Maroc qu’il avait gagné avec d’autres parlementaires sur le Massilia, il est condamné par le tribunal militaire de Clermont-Ferrand, en mai 1941, à dix ans de prison. Mais il parvient à s’échapper dès juin 1941 et à rejoindre Londres en mars 1942. En novembre 1943, il est nommé par le général de Gaulle commissaire aux Finances dans le Comité français de libération nationale. Il se voit ensuite confier, en septembre 1944, le portefeuille de ministre de l’Économie nationale dans le gouvernement provisoire de la République française dirigé par de Gaulle. Mais il démissionne dès le 5 avril 1945.

Le 18 juin 1954, il est investi président du Conseil. En seulement sept mois et dix-sept jours, Pierre Mendès France mène « une expérience gouvernementale atypique » (Serge Berstein, La République recommencée, Le Seuil, 2004, p. 264). Son exercice du pouvoir est marqué par une grande transparence : il s’adresse chaque semaine aux Français dans des allocutions radiodiffusées. Surtout, il met fin à la guerre d’Indochine et reconnaît l’indépendance de celle-ci (accords de Genève le 21 juillet 1954). Il prépare également l’indépendance tunisienne. Son gouvernement est toutefois renversé le 6 février 1955.

Après son éviction, il continue de se montrer très actif et fait notamment plusieurs conférences dans des villes françaises. Ainsi, le 23 juillet 1955, il prononce un discours marquant à Évreux, dans l’Eure, département dont il est à la fois le député (1946-1958) et le président du conseil général (1945-1958). Il y intervient sur la crise de la démocratie mais sans se contenter de développer ses vues sur la réforme des institutions. Il affirme d’abord son refus de faire jouer aux textes constitutionnels le rôle de bouc émissaire : Si les textes constitutionnels sont mauvais, corrigeons-les. Mais sachons que les textes ne sont ni la seule ni la principale cause de nos désordres, et qu’il existe une cause plus profonde ; elle réside dans les mœurs politiques, dans le manque de civisme qui, trop souvent, caractérise notre époque chez les gouvernants, les parlementaires, les partis politiques, les groupes d’intérêts, la presse, les syndicats et la masse même des électeurs.

Puis il se livre à un réquisitoire sévère (Alain Chatriot, Pierre Mendès France, A. Colin, 2015, p. 154) d’une situation marquée par l’abstentionnisme et l’indifférence de la jeunesse. Il déplore aussi le vote communiste, qu’il juge inutile et néfaste, le Parti communiste français faisant au Parlement opposition à tous les gouvernements, et avec plus d’ardeur encore aux gouvernements de progrès. Il critique également la loi électorale qui, à ses yeux, fausse l’expression populaire, étouffe ses réactions et protège les élus contre la volonté du peuple.

Afin de remédier aux nombreux problèmes de la IVe République, il appelle à dire la vérité, à proposer des programmes clairs, à instaurer la démocratie à l’intérieur des partis et à moraliser la vie publique. Pour lutter contre l’abstentionnisme, il plaide pour l’instauration du vote obligatoire assorti de sanctions. 

En outre, sur le plan institutionnel, il propose un droit de dissolution élargi pour le gouvernement, de même que la mise en place du scrutin d’arrondissement et un usage réduit des décrets-lois. Il souhaite aussi réduire le nombre des séances parlementaires à deux par semaine pour favoriser la présence des députés. Dans ce discours d’Évreux, Pierre Mendès France place ainsi les citoyens et le Parlement au cœur des institutions : En démocratie (…), le pouvoir, l’impulsion viennent du pays et du Parlement.

Éclairage média

Par Christophe Gracieux

Guillaume Gallienne, pensionnaire (1998-2005), puis sociétaire (depuis 2005) de la Comédie-Française, a plusieurs fois mis ses talents de comédien au service de la lecture de grands textes de la littérature française sur France Inter, tels que ceux de Victor Hugo ou de Marcel Proust. 

Il a aussi été choisi par la même radio publique pour réaliser deux émissions à l’occasion de l’élection présidentielle française de 2012 : la première, le 21 avril 2012, diffusée à la veille du premier tour, consacrée aux grands discours historiques ; la seconde, la semaine suivante à la veille du second tour, consacrée aux grands discours internationaux du XXe siècle. Plusieurs extraits de grands discours prononcés par les plus célèbres orateurs sont ainsi proposés, parmi lesquels le dernier discours de Périclès, l’oraison funèbre du prince de Condé par Bossuet le 2 mars 1687, le discours de Robespierre à la Convention le 3 décembre 1792, l’allocution de Danton à la Convention le 4 février 1794 ou celle de Robert Badinter à l’Assemblée nationale le 17 septembre 1981. 

À ces discours s’ajoute donc celui de Pierre Mendès France, cinq mois et demi après le renversement de son gouvernement à l’Assemblée nationale le 6 février 1955. Ce discours a été prononcé à Évreux le 23 juillet suivant, lors d’une tournée de conférences en province. Les extaits de ce discours sont lus par un autre sociétaire de la Comédie-Française, Denis Podalydès, tandis que Guillaume Gallienne présente brièvement le parcours de Pierre Mendès France. 

Dans le cas présent, plusieurs extraits du discours de Pierre Mendès France, consacré à la crise de la démocratie, ont été sélectionnés : le premier concerne les relations entre les citoyens, le gouvernement et le Parlement ; le second porte sur l’abstentionnisme et le devoir des citoyens. L’ancien président du Conseil défend ainsi un vote obligatoire avec pénalités à l’égard des déserteurs du devoir civique.

 

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