L’histoire oubliée des Tsiganes internés sous l’Occupation au camp de Jargeau
Journal régional - CentreInfos
Résumé
Parmi les 1700 personnes internées au camp de Jargeau dans le Loiret figuraient un millier de Tsiganes arrêtés par la gendarmerie française à la demande des Allemands. Contrairement aux autres internés, ils y resteront plusieurs mois après la fin de la guerre et ne seront libérés qu’à la fin de 1945. Des témoins et des historiens reviennent sur l’histoire du camp et les conditions de vie difficiles des internés.
Date de publication du document :
13 sept. 2021
Date de diffusion :
15 avr. 1995
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Contexte historique
ParAgrégé et docteur en histoire, chef du département Recherche et pédagogie de la Fondation de la Résistance
Publication : 30 sept. 2021
L’histoire des Tsiganes en France entre 1939 et 1945 est restée longtemps méconnue. Elle permet de souligner d’importantes continuités concernant la politique d’internement entre les derniers gouvernements de la Troisième République et le régime de Vichy et illustre une volonté systématique d’exclusion et de contrôle d’une population marginale considérée comme « dangereuse ».
Lors de la déclaration de guerre, en septembre 1939, les Tsiganes font l’objet de la part du gouvernement Daladier des mesures d'état de siège visant les populations peu sûres
. Un décret-loi du 6 avril 1940 interdit la circulation des nomades
sur la totalité du territoire. Ils doivent se déclarer dans les quinze jours à la brigade de gendarmerie la plus proche et sont astreints à résider dans une localité désignée par le préfet dans chaque département. Ces mesures s’expliquent par des stéréotypes de l’époque assimilant les populations nomades à des catégories « dangereuses », de possibles ennemis de l’intérieur voire des espions.
Au début de l’Occupation, les Allemands manifestent leur volonté d'éloigner des côtes de l'Atlantique intégrées à la zone occupée les éléments jugés douteux, à savoir les nomades, les juifs et les ressortissants de nations ennemies. Dès l'été 1940, le camp d'internement de Beau-Désert, à Mérignac (Gironde), est utilisé à cet effet et, à l'automne, les nomades sont refoulés des côtes vers l'intérieur du pays, notamment en Indre-et-Loire, au camp de La Morellerie. Le 4 octobre 1940, un pas de plus est franchi. Le commandement militaire allemand pour la France décide que le franchissement de la ligne de démarcation vers la zone occupée est interdit
aux Tsiganes et que ceux qui se trouvent dans cette zone doivent être transférés dans des camps d'internement surveillés par des policiers français
. L'internement en zone occupée est donc une volonté allemande mais sa mise en œuvre sera une tâche administrative française.
Au total, environ 3 000 Tsiganes ont été internés une ou plusieurs fois en France, toutes zones et toutes périodes confondues, au cours de la période de la guerre et de l’Occupation. 27 camps servirent à leur internement, 22 leur étant plus spécifiquement réservés comme celui de Jargeau près d’Orléans évoqué dans ce documentaire. Dans ces camps, les conditions de vie étaient particulièrement difficiles du fait du manque de ravitaillement, de la promiscuité et de l’absence d’hygiène. Et, à la différence d'autres catégories d'internés, les Tsiganes ne disposent pas des aides de la famille (intégralement internée) ni des œuvres d'entraide, pratiquement absentes pour eux.
S’ils ont connu un sort difficile dans les camps français, les Tsiganes de France échappèrent toutefois largement aux déportations vers les camps d'extermination allemands. En Allemagne et dans les territoires occupés de l’Est de l’Europe, les Allemands se livrèrent à une extermination systématique des populations nomades qui figuraient parmi les premiers exclus des lois de 1935 sur la protection du sang allemand
. Mais les Allemands semblent s’être désintéressés des Tsiganes internés en France. Un seul convoi de 351 Tsiganes, raflés dans le Nord, à l'initiative du commandement militaire allemand de Bruxelles (auquel sont rattachés les départements français du Nord et du Pas-de-Calais), partira de Malines (Belgique) pour Auschwitz, le 15 janvier 1944. Mais en France, dans les zones nord et sud (et même en Alsace annexée), il n'y a pas eu volonté des autorités, françaises ou allemandes, de déporter vers les camps d'extermination des nomades internés dans des camps français.
L'internement des Tsiganes en France ne prend pas fin avec la Libération. Même si les conditions de vie s'améliorent légèrement et que les libérations se multiplient, il reste, en France, 923 internés en avril 1945 et, en mai 1946, un an après l'arrêt des hostilités, les nomades seront les derniers internés à quitter les camps.
Éclairage média
ParAgrégé et docteur en histoire, chef du département Recherche et pédagogie de la Fondation de la Résistance
La méconnaissance qui entoure le sort des Tsiganes en France sous l’Occupation évoquée par le commentaire de ce documentaire s’explique par plusieurs facteurs : l’origine étrangère des personnes concernées, leur marginalité et leur faible intégration dans la communauté nationale, une forme d’indifférence à leur égard. L’épisode évoqué dans le documentaire à propos du refus jusqu’en 1991 du conseil municipal de Jargeau d’ériger une stèle à la mémoire des Tsiganes internés sur les lieux de l’ancien camp témoigne bien de l’indifférence qui a longtemps entouré le sort de cette population considérée comme « marginale ».
Pour faire la lumière sur cette histoire, le secrétariat d'État aux Anciens Combattants et Victimes de guerre, le secrétariat général à l'Intégration et la Fondation pour la mémoire de la déportation ont passé commande d’une étude scientifique sur le sujet au CNRS (Institut d’histoire du temps présent). L’historien Denis Peschanski interrogé dans ce documentaire en a été la cheville ouvrière, travaillant sur les archives françaises et allemandes, en collaboration avec Marie-Christine Hubert et Emmanuel Philippon. Le dépouillement systématique des fonds de plusieurs dizaines de départements dans lesquels sont déposées les très riches archives des camps d'internement a été complété par l'étude des dossiers de l'Inspection générale des camps conservés aux Archives nationales. Après des dizaines d'années d'ignorance, sinon d'indifférence, l’étude publiée en 1994 a enfin permis de sortir de l’oubli la façon dont l'État français avait traité les Tsiganes de 1939 à 1946 tout en évitant grâce à des données fiables et sérieuses certaines confusions (contrairement aux Juifs, les Tsiganes internés en France n’ont pas été déportés) et en revoyant à la baisse le nombre total de Tsiganes internés au cours de la période (3000 et non 30 000 comme cela avait parfois pu être écrit). Cette étude a également pu susciter d’autres travaux, notamment des monographies locales, comme le travail de Pascal Vion sur le camp de Jargeau.
C’est dans ce contexte de la découverte d’une histoire qui était jusqu’alors totalement oubliée et méconnue que s’inscrit ce documentaire réalisé pour le JT en avril 1995. Les personnes qui témoignent de leurs conditions d’internement insistent toutes sur le fait que les camps étaient gérés par l’administration française et non les Allemands et sur les conditions de vie particulièrement difficiles qu’ils eurent à supporter (faim, froid, absence de confort minimum et d’hygiène). Le commentaire insiste bien également sur l’un des éléments qui fait la spécificité des Tsiganes au regard des autres catégories d’internées : le fait qu’ils n’aient pas été libérés à la Libération mais seulement à la fin de l’année 1945.
Transcription
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