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Le rapport Stora sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 19 janv. 2021

Explication des enjeux du rapport de l’historien Benjamin Stora sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie, qui doit être remis le lendemain 20 janvier 2021 au président de la République Emmanuel Macron. Benjamin Stora, Dominique Sopo, président de SOS Racisme, et Thierry Rolando, président national du Cercle algérianiste, sont interviewés.

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Date de diffusion du média :
19 janv. 2021
Production :
France 2
Page publiée le :
03 févr. 2022
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000004465

Contexte historique

Par Christophe GracieuxProfesseur agrégé en classes préparatoires littéraires au lycée Watteau de Valenciennes )

Six décennies après la fin de la guerre d’Algérie, les mémoires de ce conflit demeurent encore très vives et conflictuelles. Plusieurs mémoires rivales de la guerre coexistent (pieds-noirs, Algériens nationalistes, harkis, immigrés algériens, soldats français). Les relations difficiles entre l’Algérie et la France rendent d’autant plus délicate une réconciliation mémorielle.

Premier président de la République française né après le conflit, Emmanuel Macron manifeste à plusieurs reprises son souhait d’apaiser les mémoires de la guerre d’Algérie. En février 2017, alors candidat à l’élection présidentielle, il avait déjà qualifié la colonisation de crime contre l’humanité lors d’une visite à Alger. Puis après son élection il reconnaît en septembre 2018 la responsabilité de l’État français dans la mort du mathématicien Maurice Audin, tué en juin 1957 par des soldats français. Et en juillet 2020, il permet la restitution à l’Algérie des crânes de vingt-quatre combattants algériens tués en 1849 lors de la conquête française du pays.

Toujours en juillet 2020, le chef de l’État français charge l’historien Benjamin Stora d’un rapport sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie. Affirmant son souhait de s’inscrire dans une volonté nouvelle de réconciliation des peuples français et algérien, Emmanuel Macron demande à ce spécialiste reconnu de la guerre d’Algérie de contribuer à l’apaisement et à la sérénité de ceux que [la guerre d’Algérie] a meurtris, (…) tant en France qu’en Algérie.

Le 20 janvier 2021, Benjamin Stora lui remet ainsi son rapport sur Les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie. L’auteur de La Gangrène et l’oubli (1991) propose d’œuvrer à la réconciliation mémorielle en ouvrant la possibilité du passage d’une mémoire communautarisée à une mémoire commune et en sortant de la concurrence victimaire entre les différents groupes porteurs de la mémoire algérienne. Pour ce faire, il formule une trentaine de préconisations concrètes. Il propose notamment de constituer une commission Mémoires et vérité chargée d’impulser des initiatives communes franco-algériennes sur les questions des mémoires. Il propose également de commémorer les différentes dates symboliques de la guerre d’Algérie : le 19 mars pour l’entrée en vigueur des accords d’Évian, le 25 septembre en hommage aux harkis et le 17 octobre en souvenir des travailleurs algériens tués le 17 octobre 1961.

Le rapport Stora accorde en outre une place importante aux recherches historiques : il préconise l’ouverture de toutes les archives, la mise en place d’une commission mixte d’historiens français et algériens sur les enlèvements et assassinats d’Européens à Oran en juillet 1962, de même que la poursuite du travail conjoint sur les lieux des essais nucléaires français réalisés en Algérie entre 1960 et 1966.

Par ailleurs, Benjamin Stora suggère plusieurs actes symboliques, dont la construction d’une stèle assortie du portrait de l’émir Abdelkader, à Amboise – où le héros de la résistance à la colonisation française avait été retenu captif de 1848 à 1852 –, ainsi que la restitution de son épée à l’Algérie. Il propose aussi la reconnaissance par la France de l’assassinat de l’avocat nationaliste algérien Ali Boumendjel durant la bataille d’Alger en 1957, ou encore l’entrée au Panthéon de Gisèle Halimi, grande figure féminine d’opposition à la guerre d’Algérie.

S’il reçoit un accueil critique en Algérie où l’on estime qu’il écarte la question des excuses officielles de la France pour les crimes de la colonisation, le rapport Stora donne lieu à plusieurs gestes symboliques : en mars 2021, Emmanuel Macron reconnaît la responsabilité de la France dans l’assassinat d’Ali Boumendjel ; en 2022, une stèle en l’honneur d’Abdelkader est édifiée à Amboise. Signe des tensions encore très vives suscités par les mémoires de la guerre d’Algérie, cette œuvre est néanmoins vandalisée peu avant son inauguration, le 5 février 2022.

Éclairage média

Par Christophe GracieuxProfesseur agrégé en classes préparatoires littéraires au lycée Watteau de Valenciennes )

Diffusé à la fin du journal télévisé de vingt heures de France 2 le 19 janvier 2021, ce sujet a pour objectif principal de s’interroger sur la nécessité pour la France de reconnaître des torts en Algérie. Le lendemain de sa diffusion l’historien Benjamin Stora doit remettre au président de la République Emmanuel Macron son rapport sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie. 

Ce reportage est découpé en plusieurs séquences, constituant autant de chapitres présentés par des infographies : la première sur les enjeux du rapport Stora, la deuxième sur le lien entre la mémoire de la guerre d’Algérie et la jeunesse française d’origine algérienne, la troisième sur les blessures mémorielles de la guerre d’Algérie et la quatrième sur l’enseignement de la colonisation et de la guerre d’Algérie. Il se compose en grande partie d’un commentaire du journaliste Jeff Wittenberg, membre du service politique de France 2, sur différentes images. Il s’appuie notamment sur des images d’illustration à commencer par celles des séquences d’ouverture et de clôture : divers plans d’une ancienne carte du domaine colonial de la France, dressée en 1911 par le géographe Joseph Forest à destination des écoliers de la métropole, visent à introduire la question du devoir mémoriel sur la colonisation française en général et celle de l’Algérie en particulier. 

Le sujet propose également de nombreuses images d’archives. Certaines datent des années 1950, sans doute filmées avant la guerre d’Algérie, montrant aussi bien des élèves lors d’un cours d’histoire sur les colonies françaises que des scènes de rue à Alger. D’autres ont été filmées pendant la guerre d’Algérie (images d’un attentat à Alger et d’un défilé de soldats harkis, explosion de la première bombe nucléaire française à Reggane en 1960). D’autres encore sont beaucoup plus récentes, tournées lors des célébrations dans les rues de Paris le 19 juillet 2019 après la victoire de l’Algérie à la coupe d’Afrique des nations de football. Le sujet comporte également deux extraits de déclarations d’Emmanuel Macron. Le premier est issu d’un discours prononcé en tant que président de la République le 2 octobre 2020 aux Mureaux sur le thème de la lutte contre les séparatismes dans lequel il aborde la question du passé colonial français. Le second est extrait d’une interview donnée à la chaîne algérienne Echorouk News, le 14 février 2017, lors de la campagne pour l’élection présidentielle de 2017, dans laquelle il avait qualifié la colonisation de crime contre l’humanité.

Pour compléter les images d’archives et d’illustration, trois interviews ont également été réalisées par Jeff Wittenberg. Celle de Benjamin Stora donne à entendre l’historien présenter les objectifs et certaines préconisations de son rapport. Les deux autres interviews témoignent, elles, de l’ampleur des fractures mémorielles sur la colonisation et la guerre d’Algérie. Dominique Sopo, président de SOS Racisme, s’en prend ainsi à ceux qui stigmatisent les populations françaises d’origine algérienne. Thierry Rolando, président national du Cercle algérianiste, association fondée en 1973 pour défendre l’histoire de l’Algérie française et la culture des pieds-noirs, met, quant à lui, en avant les souffrances subies par ces derniers ainsi que par les harkis pendant la guerre d’Algérie.

Bibliographie

  • Branche Raphaëlle, La Guerre d’Algérie : une histoire apaisée ?, Le Seuil, 2005.
  • Harbi Mohammed, Stora Benjamin (dir.), La Guerre d’Algérie, 1954-2004. La fin de l’amnésie, R. Laffont, 2004.
  • Stora Benjamin, La Gangrène et l’oubli, La Découverte, 1991.
  • Thénault Sylvie, Histoire de la guerre d’indépendance algérienne, Flammarion, 2005.

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