Si Staline n'était pas mort

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 04 janv. 1963

Madame Seintaurens, une Française mariée à un fonctionnaire soviétique, raconte à la caméra de Cinq Colonnes à la une son expérience du système concentrationnaire stalinien. Après dix-sept ans d'emprisonnement et de travaux forcés, elle est libérée à la mort de Staline et regagne la France.

Niveaux et disciplines

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Cinq Colonnes à la une
Générique :
Desgraupes Pierre (Journaliste)
Date de diffusion du média :
04 janv. 1963
Page publiée le :
27 janv. 2023
Modifiée le :
20 nov. 2023
Référence :
00000005247

Contexte historique

Par Nicolas LepoutreProfesseur agrégé d'histoire au lycée Guy de Maupassant de Colombes )

La répression mise en œuvre par le régime stalinien connaît son paroxysme en 1937-1938 au cours de la « Grande Terreur » (qui ne frappe pas seulement les élites politiques et militaires soviétiques mais de très nombreux hommes et femmes ordinaires). En l’espace de seize mois, environ 750 000 Soviétiques sont condamnés à mort par des tribunaux spéciaux et exécutés, tandis que 800 000 autres sont condamnés à des travaux forcés. Ces derniers sont envoyés en camp de travail fermé dans le cadre du Goulag (acronyme russe pour « Direction principale des camps de travail »). Outil majeur de répression, les camps ont également une fonction économique importante pour les autorités soviétiques : ils doivent permettre d’exploiter les ressources naturelles de cet immense pays et d’en assurer l’industrialisation, y compris dans des zones au climat hostile (comme à Arkhangelsk dans l’extrême-nord de l’URSS). À côté de la « zone de résidence » (des baraquements entourés de barbelés et gardés) se trouve une « zone de production » où travaillent les détenus.

Après avoir connu un pic pendant la guerre (autour de 17-18 % en 1942-1943), la mortalité au goulag baisse considérablement pour atteindre 0,8 % en 1952. En revanche, seule une petite minorité des condamnés en 1937-1938 sont effectivement libérés à l’issue de leur peine : dès lors, on compte environ 2,6 millions de détenus dans des camps ou des colonies de travail en 1953. Immédiatement après la mort de Staline en mars 1953, les excès de la Sécurité d’État (la Guépéou, le NKVD puis le ministère de la Sécurité de l’État sous Staline, ancêtres du KGB) sont dénoncés par les autorités soviétiques et un million de détenus de droit commun sont amnistiés. Les politiques sont toutefois exclus du champ de cette amnistie et ne sont libérés que progressivement en 1954-1956.

Éclairage média

Par Nicolas LepoutreProfesseur agrégé d'histoire au lycée Guy de Maupassant de Colombes )

Ce long entretien réalisé avec Mme Seintaurens, une Française mariée à un Soviétique, s’intègre dans l’émission Cinq colonnes à la Une diffusé à la télévision le 4 janvier 1963. Il met en exergue la violence de la répression du régime stalinien. Il dépeint l’URSS comme un pays paranoïaque où règne une immense peur et où chacun est devenu suspect à chacun. L’injustice et l’arbitraire y apparaissent omniprésents, qu’il s’agisse de sa condamnation en 1937 par un tribunal devant lequel elle n’avait pas comparu ou de sa prétendue libération en 1945 (en réalité une prolongation de son incarcération dans un autre camp). Les autorités soviétiques sont présentées à plusieurs reprises comme cruelles, faisant régner la terreur et poussant in fine les détenus à vouloir se suicider, mais l’émission semble en faire reposer l’entière responsabilité sur la personne de Staline (qualifié d’homme de l’absurde et de la terreur). Les premières phrases prononcées annoncent ainsi que Si Staline n’était pas mort (formule reprise dans le titre de l’émission), Mme Seintaurens serait encore aujourd’hui dans un camp de concentration soviétique.

L’ampleur de la répression est soulignée à plusieurs reprises (en insistant sur le nombre de prisons existant à Moscou, sur le nombre de personnes incarcérées par les autorités, etc.) mais deux éléments permettent au reportage d’en dépasser la dimension abstraite. C’est en effet une histoire incarnée qui est proposée, autour du témoignage de cette femme filmée en plan rapproché devant un fond noir : elle relate son expérience carcérale dans tous ses aspects (la confrontation à la bureaucratie soviétique, le logement, le travail, les relations avec les détenus de droit commun, etc.) puis le choc que constitue son retour en France. Ces plans alternent avec la reproduction des dessins qu’elle a réalisés pendant son incarcération et qui permettent de visualiser l’organisation spatiale du Goulag.

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