Avec les travailleurs français du STO en Allemagne

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 17 mars 1944 | Date d'évènement : 1944

Dans un reportage du journal « France Actualités » diffusé en mars 1944, la propagande vichyste présente sous un jour très favorable les conditions de travail en Allemagne des Français réquisitionnés au titre du STO à partir de février 1943.

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
France Actualités
Date de l'évènement :
1944
Date de diffusion du média :
17 mars 1944
Année de production :
1944
Page publiée le :
15 juin 2023
Modifiée le :
06 nov. 2023
Référence :
00000005457

Contexte historique

Par Fabrice GrenardAgrégé et docteur en histoire, chef du département Recherche et pédagogie de la Fondation de la Résistance )

Après l'échec de la politique de la « Relève » instaurée en juin 1942 (le départ de travailleurs volontaires en Allemagne doit permettre d’obtenir la libération de prisonniers de guerre) et les insuffisances des réquisitions effectuées dans le cadre de la loi d’orientation de la main-d’œuvre du 4 septembre 1942 sur critères professionnels pour répondre aux exigences des Allemands, le gouvernement Laval décrète avec une loi du 16 février 1943 le principe d’un Service obligatoire du travail (l’appellation initiale de SOT est rapidement remplacée par celle de STO) pour une durée de deux années pour tous ceux nés entre le 1ᵉʳ janvier 1920 et le 31 décembre 1922. La loi permet de satisfaire les exigences de celui que l’on surnomme le « négrier de l’Europe », Fritz Sauckel, plénipotentiaire général du Reich pour la mobilisation et l’emploi de la main-d’œuvre, qui a exigé le 1ᵉʳ janvier 1943 que 250 000 travailleurs français soient expédiés en Allemagne avant la mi-mars. 

Avec la loi du 16 février 1943, tous les jeunes des classes 1940, 1941 et 1942, âgés de 20 à 22 ans, à condition qu’ils soient déclarés aptes après avoir été convoqués à une visite médicale, sont concernés par un service obligatoire du travail qui constitue une sorte de substitut au service militaire. Ils devront pour une majorité d’entre eux travailler en Allemagne pour une durée de deux ans contre la perception d’un salaire, même si certains peuvent être affectés dans des usines françaises travaillant en faveur de l’effort de guerre allemand, notamment dans le cadre de la construction du mur de l’Atlantique pilotée par l’organisation Todt. La loi du 16 février 1943 précise les sanctions auxquelles s’exposent les Français qui essaieraient de se soustraire à leurs obligations. Des amendes et des peines d’emprisonnement allant de 3 mois à 5 ans susceptibles, en cas de récidive, d’être portées au double, seront appliquées à « toute personne ayant saboté ou tenté de saboter pour son compte ou pour le compte d’autrui le Service du travail obligatoire ». Quelques exceptions initialement prévues par la loi (agriculteurs) sont supprimées dès le mois de juin 1943. Seules quelques très rares catégories considérées comme indispensables (policiers, gendarmes) restent exemptées jusqu’à la fin de l’Occupation.

Éclairage média

Par Fabrice GrenardAgrégé et docteur en histoire, chef du département Recherche et pédagogie de la Fondation de la Résistance )

Ces images de propagande diffusées en mars 1944 sous le label « France actualités » dans les salles de cinéma de France juste avant les films développent une vision très positive du STO en montrant des travailleurs français qui travaillent dans de bonnes conditions dans les usines allemandes et peuvent même profiter de leur séjour Outre-Rhin et du « savoir-faire » industriel allemand pour se perfectionner sur le plan professionnel. L’Allemagne apparaît comme un pays de cocagne qui ne semble pas souffrir de la guerre alors que les bombardements alliés sur le pays s’intensifient. Les métiers évoqués dans le reportage concernent des secteurs qui ne participent pas directement à l’effort de guerre allemand puisque sont présentés des charrons, dentistes, chauffeur de trolleybus, tandis que les ouvriers travaillant dans les usines de guerre allemandes ne sont pas évoqués. Il s’agit bien sûr de dissimuler les vraies raisons du STO (remplacer dans les usines par de la main-d’œuvre française les Allemands mobilisés dans l’armée) et de ne pas heurter les spectateurs qui à la date du reportage soutiennent dans leur très grande majorité la cause alliée contre celle du Reich. Or les salles de cinéma peuvent constituer des lieux de manifestations de la part du public (sifflets, protestations verbales).

Ce reportage de propagande est éloigné de la réalité, puisqu’il vise à diffuser un message. Beaucoup de travailleurs français requis au titre du STO en Allemagne ont connu des conditions de vie difficiles liées à la baisse du rationnement alimentaire – alors que les ressources du Reich s’amenuisaient au fur à mesure de ses défaites –, à la peur des bombardements alliés qui visaient les régions industrielles allemandes, à une répression accrue contre ceux qui se livraient à des formes de résistance passive ou ne respectaient pas les cadences de travail qui leur étaient imposées. De fait, la propagande vichyste ou allemande n’a jamais réussi à convaincre les jeunes Français d’accepter de partir travailler en Allemagne, comme le montre le grand nombre de réfractaires au STO.

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