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Charles Baudelaire et le procès des Fleurs du mal

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 07 nov. 2021 | Date d'évènement : 20 août 1857

Le 20 août 1857, le procès contre le recueil de poèmes Les Fleurs du mal de Charles Baudelaire s'ouvre devant la 6e chambre correctionnelle de Paris. Le procureur impérial, Ernest Pinard, livre son réquisitoire contre le poète. Extrait de l'émission Autant en emporte l'Histoire.

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  • Niveaux: Cycle 4 - Lycée général et technologique - Lycée professionnel

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Date de l'évènement :
20 août 1857
Date de diffusion du média :
07 nov. 2021
Production :
RADIO FRANCE
Page publiée le :
09 août 2023
Modifiée le :
25 juin 2024
Référence :
00000005689

Contexte historique

Par Jean-Clément Martin BorellaJournaliste histoire et culture )

Les Fleurs du mal ne seront pas restées en vente bien longtemps sous la forme que Charles Baudelaire leur avait donnée. Paru le 21 juin 1857, le recueil est déféré au parquet le 7 juillet suivant, sur décision de la direction générale de la Sûreté publique. Le 20 août, Baudelaire est convoqué à la 6e chambre correctionnelle du tribunal de la Seine. Le poète est poursuivi pour deux chefs d’accusation : outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs et offense à la morale religieuse

Désireux de faire condamner Baudelaire pour la première charge, le procureur impérial, Ernest Pinard, abandonnera les atteintes à la religion. Il y a dans ce choix une astuce. Au mois de janvier 1857, Pinard n’avait pu obtenir davantage qu’un blâme pour le roman Madame Bovary de Flaubert. Aujourd’hui, il ne veut surtout pas essuyer un nouveau revers. Le procureur se montre donc moins agressif qu’attendu, demandant de la clémence pour Baudelaire, mais il exige une punition à la hauteur du préjudice moral que représente, pour la société, certaines parties de cet ouvrage. 

L’avocat de Baudelaire, le jeune Gustave Chaix d’Est-Ange – fils d’un sénateur du second Empire – défend l’idée que Baudelaire a peint le mal pour que les lecteurs s’en éloignent ou encore que des auteurs de renom, tels Rabelais, La Fontaine ou Lamartine, avaient évoqué des sujets scabreux dans leurs œuvres sans avoir été inquiétés pour autant. Mais Baudelaire fut condamné à une amende de 300 francs (réduite à 50 francs après supplique auprès de l’impératrice Eugénie) et à retirer six pièces du recueil (Les Bijoux, Le Léthé, À celle qui est trop gaie, Femmes damnées, Lesbos et Les Métamorphoses du vampire). Une ridicule opération chirurgicale, selon les mots de Baudelaire, qui le meurtrit au plus profond de son âme. La cohérence du livre s’effondre et le poète rééquilibre l’ensemble par l’ajout de poèmes nouveaux. Ce n’est que près d’un siècle plus tard, en 1949, que la chambre criminelle de la Cour de cassation, sur demande du président de la Société des gens de lettres, cassera le jugement et réintégrera les six poèmes interdits de publication.

Éclairage média

Par Jean-Clément Martin BorellaJournaliste histoire et culture )

Depuis 2015, France Inter propose chaque semaine une fiction relatant un événement significatif de la vie d’un personnage de notre passé. Sur le modèle des dramatiques (une forme élaborée de théâtre radiophonique) fréquentes sur France Culture, l’émission Autant en emporte l’Histoire de Stéphanie Duncan fait revivre aux auditeurs, le 7 novembre 2021, le procès des Fleurs du mal de Charles Baudelaire. Le réalisateur, Cédric Aussir, a construit son récit autour de sept personnages : Baudelaire, bien sûr ; son avocat, Gustave Chaix d’Est-Ange ; Charles Asselineau, l’ami fidèle qui était bien présent au procès puisqu’il a couché par écrit le déroulé de l’audience ; Ernest Pinard, l’intransigeant procureur impérial ; Apollonie Sabatier, salonnière et muse à qui Baudelaire demanda de faire jouer ses relations ; et, enfin, Jeanne Duval, maîtresse et première muse, dont la présence ici peut néanmoins étonner. Si aucun acteur ne prête sa voix à l’éditeur de Baudelaire, Auguste Poulet-Malassis, c’est parce que celui-ci n’était pas présent, au contraire de son associé, l’imprimeur Eugène de Broise.  

Dans cet extrait, nous entendons une partie du réquisitoire d’Ernest Pinard contre Les Fleurs du mal, dont nous connaissons l’intégralité grâce aux archives. Le fond étant dicté par une source historique précise, c’est sur la forme que la fiction prend ses droits : le ton choisi est celui d’un accusateur public capable de produire de la logique et de l’éloquence, selon la formule de l’ouvrage La Tribune judiciaire publié en 1857. La voix se veut volontairement acerbe et c’est bien le rôle du méchant qui lui est attribué dans cette fiction puisqu’il est mandaté par le pouvoir politique pour condamner. La création fait la part belle aux extraits de poèmes, que Pinard cite abondamment afin de dénoncer leur réalisme grossier. Non sans hypocrisie puisque, chez les défenseurs de vertu, l’époque est à la fréquentation assidue des lupanars. Les réactions de Baudelaire sont imaginées, mais expriment bien sa profonde incompréhension. D’après le témoignage de Charles Asselineau, le poète s’attendait non seulement à être acquitté, mais il imaginait même qu’on lui ferait réparation pour l’affront que représente la poursuite en justice d’un artiste.

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