audio

Francis Ponge, l’ami des choses

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 04 déc. 1980

Le 4 décembre 1980, Francis Ponge était l’invité de l’émission Radioscopie sur France Inter. L’occasion d’expliquer son amour des choses qui nous entourent, toutes aussi méritantes que l’homme à figurer dans une œuvre poétique.

Niveaux et disciplines

Ressources pédagogiques utilisant ce média

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Générique :
Chancel Jacques (Producteur), Chancel Jacques (Journaliste)
Date de diffusion du média :
04 déc. 1980
Production :
@ 1980 -  RADIO FRANCE
Page publiée le :
05 févr. 2024
Modifiée le :
27 févr. 2024
Référence :
00000005881

Contexte historique

Par Jean-Clément Martin BorellaJournaliste histoire et culture )

Dans un texte de 1947 intitulé L’Homme et les Choses, Jean-Paul Sartre consacre Francis Ponge en tant que poète des objets, un qualificatif qui lui convient à merveille, puisqu’il a ouvert à lui-seul une voie inexplorée jusqu’alors. Il est, en effet, le premier poète – bien que ce terme lui déplaise – à proposer à ses lecteurs des textes dans lesquels « les choses » (il intègre dans ce mot les animaux et les végétaux) sont considérées comme des sujets à part entière. Le galet, la guêpe, l’œillet et même la boue, représentants, parmi d’autres, du monde muet, ont le droit à la parole. Avant lui, les poètes n’ont pensé qu’à eux-mêmes, exprimant avec bien trop d’ardeur, trouve-t-il, leurs sentiments personnels. Fasciné par le spectacle autonome de la nature, mais aussi par celui de l’industrie, Francis Ponge fait des objets non poétiques les sujets de ses œuvres principales : Le Parti pris des choses (1942) et La Rage de l’expression (1952). Ce qui me pousse à écrire, c’est l’émotion que me procure le mutisme des choses qui nous entourent. […] J’ai le sentiment d’instances muettes de la part des choses, qui solliciteraient de nous qu’enfin l’on s’occupe d’elles et les parle…, explique-t-il, en 1953, dans Réponse à une enquête radiophonique sur la diction poétique. La tâche est ardue, car Ponge décrit les objets avec le langage des hommes, ceux-là mêmes qui méprisent les choses, et c’est donc un profond travail sur la langue que l’artiste en prose – terme qu’il adopte volontiers – se doit d’entreprendre en parallèle, afin de considérer ses sujets d’étude dans toutes leurs dimensions.

Éclairage média

Par Jean-Clément Martin BorellaJournaliste histoire et culture )

Émission phare de l’histoire de France Inter, Radioscopie a donné à entendre, de 1968 à 1990, un large panel de personnalités ayant compté dans les domaines de la politique et de la culture principalement, mais aussi des sciences et du sport. Chaque jour, en fin d’après-midi, Jacques Chancel recevait un invité en studio, permettant à l’auditeur de mieux le connaître. Le 4 décembre 1980, Francis Ponge se prêtait à l’exercice. Ȃgé de 81 ans, le poète était alors au sommet de sa gloire.

Dans cet extrait, Jacques Chancel questionne Francis Ponge sur son rapport aux mots et semble vouloir jouer avec lui. Quel est votre mot préféré ?, lui demande-t-il ? Ponge répond, évidemment, qu’il n’en a pas, qu’il les aime tous. Choisir entre les mots ou les choses – les deux sont indissociables – ce serait comme choisir entre les hommes. L’homme, justement, en prend ici pour son grade et semble représenter ce que ce poète singulier a toujours voulu combattre. Il est trop présomptueux, bien qu’il ne soit pas si grand. « Pourquoi avez-vous pris tant de temps à écouter les mots parler, comme la figue ? », renchérit le présentateur, comme pour le pousser à prendre son parti. Assez gravement, Ponge expose alors ce fait que nous semblons oublier, peut-être parce qu’il est inquiétant : toutes les choses de la nature sont plus imaginatives, plus adaptables, et donc plus durables que nous. En prenant l’exemple de cette figue, dont l’arbre peut vivre 300 ans, le poète n’a guère besoin de nous convaincre que si elle était là avant nous, il y a de grandes chances qu’elle le soit après. Chancel semble acquiescer et l’auditeur d’aujourd’hui, sensibilisé aux questions environnementales, peut-être encore davantage.

Personnalités

Thèmes

Sur le même thème