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Le procès contre Charlie Hebdo pour la publication de caricatures de Mahomet

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 07 fĂ©vr. 2007

Le procès contre Charlie Hebdo, intenté par des organisations musulmanes en raison de la publication de caricatures de Mahomet en 2006, s'ouvre le 7 février 2007 devant le tribunal correctionnel de Paris. Philippe Val, Élisabeth Badinter et François Hollande, Abdallah Zerki et Francis Szpiner sont interviewés.

Niveaux et disciplines

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du mĂ©dia :
07 févr. 2007
Production :
INA
Page publiĂ©e le :
15 mai 2015
ModifiĂ©e le :
29 juin 2023
RĂ©fĂ©rence :
00000001711

Contexte historique

Par Christophe Gracieux

Le 8 fĂ©vrier 2006, Charlie Hebdo publie un numĂ©ro spĂ©cial consacrĂ© Ă  Mahomet. La rĂ©daction de l'hebdomadaire satirique souhaitait manifester sa solidaritĂ© avec les douze auteurs danois menacĂ©s de mort depuis la parution de leurs caricatures de Mahomet dans le quotidien Jyllands-Posten en septembre 2005 (voir Les dessinateurs de presse et les caricatures du prophète Mahomet). Plus largement elle voulait ouvrir le dĂ©bat sur la libertĂ© d'expression. Dans le numĂ©ro spĂ©cial figurent ainsi les caricatures danoises mais Ă©galement d'autres dessins de Mahomet rĂ©alisĂ©s par les collaborateurs de Charlie Hebdo. La une se constitue d'un dessin Cabu reprĂ©sentant Mahomet qui dĂ©plore : « C'est dur d'ĂŞtre aimĂ© par des cons. Â»

Le Conseil français du culte musulman, la Grande MosquĂ©e de Paris et l'Union des organisations islamiques de France tentent bien d'empĂŞcher la sortie du numĂ©ro en assignant en rĂ©fĂ©rĂ© le directeur de la publication de Charlie Hebdo Philippe Val la veille devant la 1ère chambre du tribunal de grande instance de Paris. Mais elles sont dĂ©boutĂ©es en raison d'un vice de forme dans la procĂ©dure (voir DĂ©cision de justice après la demande de saisie du journal Charlie Hebdo ). Cela ne les empĂŞche pas ensuite d'intenter un procès Ă  Philippe Val pour « injure publique Ă  l'Ă©gard d'un groupe de personnes en raison de leur religion Â». Seul Charlie Hebdo est poursuivi. France Soir ne l'est pas alors qu'il est le premier journal Ă  avoir publiĂ© les caricatures en France. Les plaignants jugent en effet que seul Charlie Hebdo a dĂ©libĂ©rĂ©ment cherchĂ© la provocation et entretenu la confusion entre islam et terrorisme. L'action judiciaire n'est par ailleurs engagĂ©e que contre trois caricatures : deux des douze dessins danois (dans le premier Mahomet a la tĂŞte couverte d'un turban en forme de bombe, dans le second il accueille des terroristes au paradis en leur disant qu'il n'y a plus de vierges pour eux) et le dessin de Cabu paru en une de Charlie Hebdo.

Le procès se tient les 7 et 8 février 2007 devant la 17e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris, spécialisée dans les affaires de presse. Il est très médiatisé car, au-delà des caricatures de Mahomet, il soulève la question du principe de la liberté d'expression. C'est du reste dans ce but que la défense cite comme témoins des hommes politiques et des intellectuels. Le premier secrétaire du Parti socialiste François Hollande et le président de l'UDF François Bayrou viennent ainsi à la barre défendre la liberté d'expression. Un message de soutien à Charlie Hebdo de Nicolas Sarkozy est également lu au cours de l'audience. Des intellectuels viennent aussi témoigner en faveur de Charlie Hebdo, tels que la philosophe Elisabeth Badinter et le rédacteur en chef des pages culturelles du Jyllands-Posten Fleming Rose. À l'inverse, les avocats des plaignants jugent que la liberté d'expression trouve sa limite dans le droit à l'exercice de sa religion.

Finalement, le 23 mars 2007, Philippe Val est relaxĂ©. Le tribunal correctionnel de Paris juge en effet que « le genre littĂ©raire de la caricature, bien que dĂ©libĂ©rĂ©ment provocant, participe (...) Ă  la libertĂ© d'expression Â» et que les dessins parus dans Charlie Hebdo « apparaissent exclusifs de toute volontĂ© dĂ©libĂ©rĂ©e d'offenser directement et gratuitement l'ensemble des musulmans. Â» Cependant, l'Union des organisations islamiques de France intente un procès en appel Ă  Philippe Val mais celui-ci voit sa relaxe confirmĂ©e par la Cour d'appel de Paris le 22 mars 2008.

MalgrĂ© ces jugements favorables, Charlie Hebdo est placĂ© sous protection policière en raison des menaces de mort reçues par ses journalistes. Les locaux du journal sont d'ailleurs partiellement dĂ©truits par un incendie volontaire le 2 novembre 2011. Surtout, le 7 janvier 2015, un attentat terroriste vise le siège du journal Ă  Paris : douze personnes, dont huit collaborateurs du journal, parmi lesquels les dessinateurs Cabu, Wolinski, Tignous et HonorĂ© ainsi que le directeur de la publication Charb, sont assassinĂ©s par deux terroristes djihadistes, les frères Kouachi.

Éclairage média

Par Christophe Gracieux

Ce sujet a Ă©tĂ© diffusĂ© le 7 fĂ©vrier 2007, au soir de la première journĂ©e d'audience du procès du journal Charlie Hebdo, poursuivi par des organisations musulmanes pour avoir publiĂ© des caricatures de Mahomet le 8 fĂ©vrier 2006. Il se compose d'images factuelles et d'interviews, toutes filmĂ©es au Palais de justice de Paris. Il ne comporte aucun plan des trois caricatures qui ont poussĂ© les plaignants Ă  engager le procès : ni des deux caricatures parues initialement dans le quotidien danois Jyllands-Posten, ni de celle de Cabu publiĂ©e en une. Ces dessins ne sont mĂŞme pas dĂ©crits par le journaliste.

Le reportage ne comprend aucune image filmĂ©e pendant le procès intentĂ© Ă  Charlie Hebdo. En effet, depuis la loi n° 54-1218 du 6 dĂ©cembre 1954 modifiant et complĂ©tant l'article 39 de la loi du 29 juillet 1881 sur la libertĂ© de la presse, la photographie, la radiodiffusion et la tĂ©lĂ©vision des dĂ©bats judiciaires sont interdites en France. Aucune prise de vue par une camĂ©ra de tĂ©lĂ©vision n'est ainsi autorisĂ©e « pendant le cours des dĂ©bats et Ă  l'intĂ©rieur des salles d'audience des tribunaux (...) judiciaires. Â» Cette interdiction vise Ă  prĂ©server la sĂ©rĂ©nitĂ© et l'objectivitĂ© des dĂ©bats. De ce fait, l'ensemble des images du sujet ont Ă©tĂ© filmĂ©es devant la salle d'audience de la dix-septième chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris et non en son sein : un plan du fronton de la cette chambre en atteste. C'est donc bien Ă  l'extĂ©rieur de la salle d'audience que sont filmĂ©s certains collaborateurs de Charlie Hebdo, François Cavanna et Caroline Fourest, venus soutenir le directeur de la publication Philippe Val. C'est Ă©galement dans les couloirs situĂ©s autour de la salle d'audience qu'ont Ă©tĂ© enregistrĂ©es les interviews.

Les interviews de protagonistes du procès, rĂ©alisĂ©es avant et après l'audience, occupent en effet une place essentielle dans ce sujet, comme dans tous les sujets judiciaires. En l'absence d'images filmĂ©es dans l'enceinte du prĂ©toire, elles donnent Ă  entendre les arguments des reprĂ©sentants de la dĂ©fense comme ceux des plaignants. Elles permettent en quelque sorte de rejouer le procès devant une forĂŞt de camĂ©ras et micros. Dans le cas prĂ©sent, elles prennent d'autant plus d'importance que deux des personnes interrogĂ©es sont des personnalitĂ©s citĂ©es comme tĂ©moins au procès par la rĂ©daction de Charlie Hebdo : la philosophe Elisabeth Badinter et le premier secrĂ©taire du Parti socialiste François Hollande. Le directeur de la publication de l'hebdomadaire satirique, Philippe Val, est Ă©galement interrogĂ© brièvement avant l'audience.

L'Ă©quipe de France 3 ne donne cependant pas uniquement la parole Ă  la dĂ©fense mais Ă©galement aux plaignants. Le reportage intègre aussi des interviews d'Abdallah Zekri, membre du Conseil français du culte musulman, et de Francis Szpiner, l'un des avocats des plaignants. Ce traitement assez Ă©quilibrĂ© entre les deux parties permet de mettre en lumière les arguments principaux : les tĂ©moins de Charlie Hebdo se font avant tout les dĂ©fenseurs de la libertĂ© d'expression, tandis que les reprĂ©sentants des plaignants dĂ©noncent le racisme des caricatures ainsi que le soutien du ministre de l'IntĂ©rieur Nicolas Sarkozy Ă  Charlie Hebdo.

Le sujet se clĂ´t du reste sur une scène Ă©tonnante : on aperçoit les avocats des deux parties, Francis Szpiner et Georges Kiejman, discuter avec le sourire sous le regard des camĂ©ras. On est ainsi loin de l'atmosphère enfiĂ©vrĂ©e des dĂ©bats de l'audience ou mĂŞme de l'interview d'Abdallah Zekri.

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