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Le transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 19 déc. 1964

André Malraux fait l'éloge funèbre de Jean Moulin avant son entrée au Panthéon.

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
19 déc. 1964
Production :
INA
Page publiée le :
2006
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000000559

Contexte historique

Par Vincent Casanova

Après le deuil des premières années (1945-47) et les déchirements (1947-54) vient le temps des silences et des refoulements des mémoires de la Seconde Guerre mondiale. Cette volonté d'oubli se traduit par le désintérêt croissant des ouvrages consacrés à la Seconde Guerre mondiale, l'atonie des commémorations du 8 mai et la difficulté par exemple des maquisards ardennais à fixer la mémoire de leur combat car leur chef, Jacques de la Bollardière, est détesté des autorités pour avoir dénoncé les tortures en Algérie.

L'idée de transférer au Panthéon, pour le 20e anniversaire de la Libération, les cendres de Jean Moulin, qui pendant la guerre a été le représentant de De Gaulle et grâce auquel la Résistance a pu s'unir dans le Conseil national de la Résistance sous la tutelle du Général, revient à l'Union des résistants de l'Hérault et elle est relayée par la gauche locale. Le projet est repris par Malraux alors ministre d'État aux Affaires culturelles puis par le chef de l'État lui-même qui, fait exceptionnel, promulgue le décret. Le transfert se déroule après le vote d'amnistie des délits commis pendant la guerre d'Algérie et une semaine avant le vote de l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité : entre l'oubli des crimes d'Algérie et la réaffirmation que l'on n'oublie pas ceux de la Seconde Guerre mondiale, il s'agit d'opérer une sélection du passé propre à ressouder la cohésion nationale.

La cérémonie se déroule les 18 et 19 décembre 1964 en deux temps. Tout d'abord a lieu l'exhumation et le transfert de l'urne du Père-Lachaise à la crypte des martyrs de la déportation dans l'île de la Cité : 194 compagnons de la Libération de toute tendance, y compris les communistes, forment une garde d'honneur. Le transfert au Panthéon s'effectue de nuit à travers Paris. Le lendemain, c'est le Général qui préside les hommages avec la pompe républicaine. À midi, Malraux prononce l'éloge funèbre conclu par Le Chant des Partisans puis c'est le défilé militaire. Cette journée est centrée sur le général de Gaulle qui vole la vedette au héros : le discours lui est d'ailleurs adressé à lui seul, en tant que président de la République mais aussi en tant qu'Homme du 18 juin. Derrière le discours se profile une équation simple : Jean Moulin = Résistance = de Gaulle = France.

L'entrée des cendres de Moulin au Panthéon sert le mythe d'une France résistante unie autour de De Gaulle. Elle sert donc la mémoire officielle de la guerre. Grâce à Moulin, les résistants se sont effacés devant la Résistance, ici entendue comme résistance gaulliste. Le ton lyrique du discours et le tutoiement (entre ici, Jean Moulin) a pour but de rappeler le compagnonnage résistant (Malraux n'entra en Résistance que tardivement cependant), la proximité avec l'homme. Moulin, héroïsé, représente à lui seul le combat pour la liberté, le martyre de tout un peuple. La France des années 50-60 s'identifie ainsi au mythe résistancialiste. Considérant que la France et les Français ont tous résisté, sont passées sous silence les discordes et la guerre civile, l'adhésion au régime de Vichy et la collaboration à la déportation des Juifs.

Éclairage média

Par Vincent Casanova

Diffusée en direct à la télévision, la cérémonie du transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon participe de la volonté de construction d'une mémoire nationale de la Seconde Guerre mondiale. Alternant plans serrés et plans larges, André Malraux debout derrière son pupitre, portant des lunettes, psalmodie à la manière des grands orateurs tragiques. Par les inserts de photographies (cachots, visages de Moulin, de Gaulle...), il s'agit de donner à voir ce que fut la Résistance.

La télévision est ainsi investie d'une mission d'éducation, d'une mission mémorielle. La présence d'Alain Peyrefitte, le ministre de l'Information, aux côtés du Général, vient rappeler à quel point les médias étaient à l'époque placée sous le contrôle direct du pouvoir.

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