La poésie selon Rimbaud

Comment définir la poésie de Rimbaud ? Retour sur les influences et les sources d'inspiration de l'homme aux semelles de vent, mais, bien sûr aussi, sur les expérimentations poétiques qu'il a menées.

 

Dans le poème Alchimie du verbe (présent dans le recueil Une saison en enfer), Arthur Rimbaud écrit : 

Je réglai la forme et le mouvement de chaque consonne et, avec des rythmes instinctifs, je me flattai d’inventer un verbe poétique accessible, un jour ou l’autre, à tous les sens.

Renouveler le langage pour saisir l’aspect caché du monde et établir des correspondances entre les choses les plus éloignées en apparence, telles sont les obsessions poétiques de Rimbaud. Son projet est de dépasser Baudelaire, qui a ouvert la voie du nouveau rapport entre les mondes matériel et spirituel, mais qui n’est pas, selon lui, allé assez loin : « Les inventions d’inconnu réclament des formes nouvelles. » Rimbaud se veut « voyant », ce qu’il explique dans une lettre envoyée à Paul Demeny le 15 mai 1871, seule trace écrite de son programme poétique. Il lui écrit :

Le Poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens. […] Il épuise en lui tous les poisons pour n’en garder que les quintessences.

 

Dans la lettre du voyant, Rimbaud expose ce qui s’est fait avant lui, ce qu’il aime et ce qu’il n’aime pas. « Cette lettre est une profession de foi personnelle, mais elle porte aussi un respect à la tradition », estime André Guyaux, spécialiste de Rimbaud. 

 

La poésie de Rimbaud est donc un « amalgame de lectures et de rêves d’évasion », selon André Guyaux, grand spécialiste du poète de Charleville. Dans le fond, les thèmes chers aux poètes du XIXe siècle sont bien présents : l’ennui, l’utopie… La forme, elle, est plus novatrice : poèmes en prose, économie de ponctuation, non-respect des règles de la rime... Rimbaud est comme le capitaine d’une embarcation poétique à la dérive, qui le mènera à vouloir lui-même vivre d’aventures. Il accomplit alors le vrai grand départ et commence, à 21 ans, une vie éloignée de l’écriture, mais pas de son idée de la poésie : 

La vie d’aventures qui existe dans les livres d’enfance, me la donneras-tu ?