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Lutte contre le terrorisme : débat politique sur la législation

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 30 oct. 2020

À l'automne 2020, trois attentats islamistes perpétrés sur le sol français en l’espace d’un mois relancent le débat sur la réponse politique à adopter face à la menace terroriste. 

Niveaux et disciplines

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
30 oct. 2020
Production :
@ 2020 -  France Télévisions
Page publiée le :
06 mars 2024
Modifiée le :
25 juil. 2024
Référence :
00000005989

Contexte historique

Par Lucie VouzelaudProfesseure agrégée d'histoire, responsable du pôle pédagogique du Musée-mémorial du terrorisme )

L’automne 2020 est marqué par le terrorisme islamiste en France. Alors que se tient, au tribunal judiciaire de Paris, le procès des attentats de janvier 2015 (contre Charlie Hebdo, contre une policière à Montrouge et contre une supérette casher), une série d’attaques rappelle que la menace reste toujours d’actualité.  
Le 25 septembre 2020, deux employés de l’agence de presse Premières Lignes, dont les locaux sont situés à côté des anciens locaux de Charlie Hebdo, rue Nicolas-Appert (XIe arrondissement de Paris), sont blessés dans une attaque au hachoir. L’assaillant, un Pakistanais de 25 ans qui ignorait que l’hebdomadaire satirique avait déménagé, a agi en réaction à la nouvelle publication des caricatures danoises de Mahomet initialement parues en 2006.
Le 16 octobre 2020, Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), est assassiné à la sortie de son collège et décapité par un jeune djihadiste d’origine tchétchène. 
Le 29 octobre 2020, l’attentat de la basilique Notre-Dame de l’Assomption, à Nice, fait trois morts. Le sacristain et deux femmes venues prier ont été attaqués par un ressortissant tunisien de 21 ans armé d’un couteau.
Ce n’est pas la première fois qu’Emmanuel Macron est bousculé par le terrorisme : en octobre 2017, une attaque au couteau a coûté la vie à deux femmes à la gare Saint-Charles à Marseille ; en mars 2018, les attentats de Trèbes et de Carcassonne ont fait quatre morts (dont le gendarme Arnaud Beltrame) ; le 11 décembre 2018, l’attentat du marché de Noël de Strasbourg a tué cinq personnes. 
Plusieurs mesures sont prises pour faire face à cette situation. À la suite des attentats terroristes du 13 novembre 2015 (Bataclan, Stade de France), François Hollande avait déclaré l’état d’urgence. Un certain nombre de dispositions sont pérennisées, notamment la loi sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme (SILT) et l’arsenal juridique est renforcé. De fait, 2021 est une année particulièrement chargée en lois et en mesures sécuritaires : loi sécurité globale en mai 2021 ; loi du 30 juillet 2021 relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement ; loi confortant le respect des principes de la République, dite aussi loi contre le séparatisme du 24 août 2021 qui renforce notamment la protection des élus et agents publics, dont les enseignants. Ces textes sont tous la conséquence de la séquence d’octobre 2020 et, en particulier, de l’émoi national suscité par l’assassinat particulièrement barbare de l’enseignant Samuel Paty. 
Depuis la vague d’attentats de 1986, la législation antiterroriste s’est adaptée aux évolutions du terrorisme ciblant les intérêts de la France sur son sol ou à l’étranger, la rhétorique guerrière revenant systématiquement dans les prises de parole des représentants politiques. Charles Pasqua invite ses services à terroriser les terroristes en 1986. À partir de 2015, la législation et la justice antiterroristes sont au cœur de débats et dissensions politiques, la droite critiquant l’absence de fermeté de l’État ; la gauche dénonçant une réponse disproportionnée faisant le jeu des terroristes. Les perquisitions administratives se multiplient après l’assassinat de Samuel Paty, le 16 octobre 2020. Mais, sur les 272 menées dans le mois qui suit l’attentat contre l’enseignant, aucune n’aboutit à l’ouverture d’une enquête, ce qui témoigne du caractère très réactionnel de l’État dans ce contexte particulier. 

Éclairage média

Par Lucie VouzelaudProfesseure agrégée d'histoire, responsable du pôle pédagogique du Musée-mémorial du terrorisme )

Le sociologue Randall Collins a théorisé, au travers des réactions de la société américaine au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, les différentes séquences qui suivent une attaque terroriste. Sa théorie est reprise par le sociologue Gérôme Truc dans Sidérations, une sociologie des attentats (Paris, PUF, 2016). Suscitant des émotions très fortes, l’attentat plonge la société dans une phase de sidération qui dure 24 à 48 heures. Puis, durant une à deux semaines, surgissent les expressions de solidarité et de patriotisme. Mais, à cette phase d’union nationale, succède une période difficile pour les sociétés démocratiques qui dure deux à trois mois et se caractérise par une forme d’hystérisation du débat, de commentaires en boucle dans les médias qui invitent un bataillon d’experts d’horizons divers. Cette phase est propice aux récupérations politiques et correspond à la stratégie de la tension que suivent les terroristes : polariser le débat, faire monter les postures extrêmes, diviser la société et, ce faisant, fragiliser son fonctionnement démocratique. 
Ici, les temporalités s’emboîtent, puisque trois attentats sont survenus en l’espace d’un mois. Le temps de l’union nationale est donc passé et, dès le lendemain de l’attentat du 29 octobre 2020 à la basilique Notre-Dame de l’Assomption, à Nice, les dissensions politiques s’expriment.
Ainsi le débat politique se focalise sur la menace terroriste à l’automne 2020, où plusieurs membres de l’opposition (notamment des personnalités des Républicains, du parti socialiste et de la France insoumise) s’expriment publiquement sur les enjeux de la législation antiterroriste, remettant en question la gestion par l’État. 
L’édition nationale du 19/20 le 30 octobre 2020 ouvre sur le contexte sanitaire de l’épidémie de Covid-19. L’attentat à Nice est le deuxième sujet du journal, abordé à la neuvième minute. Le premier reportage donne la parole aux Niçois qui se rassemblent pour un hommage et expriment leur solidarité avec les victimes. Puis le profil et la course du terroriste sont évoqués. Vient ensuite le sujet de la sécurité, avec le renforcement du plan Vigipirate sous la bannière terrorisme, sécurité renforcée. Enfin, le reportage sur la législation antiterroriste, dans le dernier tiers du journal, laisse largement la parole à des personnalités politiques ; les Républicains Éric Ciotti, député des Alpes-Maritimes, Christian Estrosi, maire de Nice, et Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de- France, en appellent à modifier la loi. Éric Ciotti suggère par exemple la mise en place d’un Guantanamo à la française ; Christian Estrosi évoque, quant à lui, la possibilité de modifier la Constitution. Les élus de gauche, Sébastien Pietrasanta, ancien député socialiste et spécialiste de sécurité intérieure, Alexis Corbière, député de la France insoumise de Seine-Saint-Denis, Gérard Darmanin, ministre de l'Intérieur, et le professeur de criminologie Alain Bauer considèrent que l’arsenal juridique est suffisant. 

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